Comment Black Lives Matter s’est invité dans l’élection présidentielle américaine

[dropcap size=big]6[/dropcap]2 ans après l’abolition de la ségrégation raciale et 8 ans après l’élection du président Barack Obama, on pourrait penser que la distinction raciale n’est qu’histoire ancienne. Aujourd’hui c’est pourtant une nouvelle lutte contre la discrimination des Afro-américains qui secoue les États-Unis. Les activistes de Black Lives Matter reprennent le flambeau du Black Power et ce depuis 4 ans déjà et se sont invité dans l’élection présidentielle qui se déroulera mardi 8 novembre. 

En 2012 une altercation a lieu entre Trayvon Martin, jeune homme de 17 ans qui rentrait chez lui et George Zimmerman, agent de surveillance du quartier fermé de Stanford où résidait Trayvon. Alors que l’agent juge le comportement du garçon étrange, il prévient les services de police et décide d’intervenir sans attendre. Il sort alors de son véhicule pour interpeller le garçon, le ton monte, et c’est lors d’un violent accrochage entre les deux hommes que Zimmerman tire à bout portant sur le jeune homme. Le coup de feu est mortel. Lorsque la police arrive sur les lieux l’agent de surveillance affirme que son geste n’était que légitime défense, selon lui le jeune homme l’aurait attaqué. Il est tout de même interrogé cinq heures durant, mais fini par être libéré sans qu’aucun motif d’inculpation de soit retenu contre lui.

George Zimmerman, l'homme (?) qui a tué Trayvon Martin, a depuis vendu son arme aux enchères, la qualifiant de "morceau de l'histoire des États-Unis"
George Zimmerman, l’homme qui a tué Trayvon Martin, a depuis vendu son arme aux enchères, la qualifiant de “morceau de l’histoire des États-Unis”

Ces événements entraînent de nombreuses réactions dans l’opinion publique, beaucoup accusant George Zimmerman d’avoir commis un crime raciste. Au milieu de ces réactions naît le mouvement Black Lives Matter crée par Alicia Garza, Patriss Cullors and Opal Tometi. Il prend de l’ampleur après plusieurs événements similaires tels que la mort d’Eric Garner ou Freddie Gray décédés suite à des blessures causées pendant leurs arrestations, mais surtout suite à l’affaire Micheal Brown, jeune garçon de 18 ans, abattu alors par un policier alors qu’il n’était pas armé, un événement qui entraînera d’ailleurs des émeutes dans la ville de Ferguson. D’autres meurtres ont été relayés depuis et la remise en liberté des policiers en question ne fait que nourrir les accusations qu’ils leur sont portés : dénigrer l’importance de la vie des noirs.

Le slogan-hashtag du mouvement, #BLACKLIVERSMATTER  rencontre un immense succès. Cité plus de 4 millions de fois sur les réseaux sociaux comme Twitter, notamment par des célébrités qui se rallient à la cause, il est également présent dans la rue, recouvrant des banderoles et scandé par , partout dans le monde les happenings se multiplient.

Place du Trocadéro – Des protestants montrent leur colère  face aux violences policières aux USA et en France. (François Guillot/AFP)

Aujourd’hui, l’ampleur de ce mouvement est telle qu’elle en est devenue un problème politique. Des militants ont interrompu des meetings de candidats tels qu’Hillary Clinton ou Bernie Sanders prenant leurs micros d’assaut, afin de noter que leurs agendas ne tiennent pas assez compte des questions raciales. Ils poussent ainsi les candidats à inscrire, pour la première fois de l’histoire électorale américaine, la lutte contre le racisme à leur agenda. Hillary officialise alors le soutien du parti démocrate par sa promesse de s’attaquer au “racisme systémique” ainsi que de guérir “les divisions” lors de son meeting à l’université St. Augustine [NDLR : Institution historique de la communauté noire] à Ralleigh, en Caroline du Nord.

Dans le même temps, les activistes s’attaquent au parti adverse, notamment à l’homme au cœur de toutes les attentions, le candidat républicain à l’élection présidentielle qui se déroulera demain. En effet de nombreux partisans du mouvement appelent au boycott de Donald Trump après ses prises de positions extrêmes à l’égard des minorités, ainsi qu’à cause de son refus de traiter les questions de violences policières. De nombreux incidents ont éclaté lors de meetings du candidat républicains alors qu’il tentait de faire entendre leurs voix, allant jusqu’à des violences envers des militants du mouvement pour les pousser à quitter les lieux.

Le candidat républicain a-t-il une chance d’être élu alors que la mobilisation des minorités s’impose aujourd’hui comme un élément-clé pour la victoire des élections présidentielles ? Nous connaîtrons la réponse dans la nuit de mardi à mercredi, dates des résultats de l’élection.

En attendant, on vous invite à en apprendre un peu plus sur l’histoire de ce mouvement et à mieux en comprendre les enjeux à travers la websérie documentaire “Noir Amérique” de 8 épisodes signés par l’auteure française Caroline Blache en association avec l’écrivain franco-congolais Alain Mabanckou. À découvrir sur Arte.tv

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