C’est la fin d’une longue épopée pour la marque American Apparel qui fermera son usine, son siège social ainsi que tous ses magasins basés aux Etats-Unis en avril 2017. La marque de vêtements américaine a été vendu aux enchères aux créateurs de tee-shirts canadiens Gildan, suite à sa faillite.
Cette compagnie a été créé par Dov Charney en 1989, dans sa ville natale à Montréal. Bien que la marque ait été lancée au Canada, le fondateur a rapidement voulu migrer aux Etats-Unis pour la qualité de son coton. La marque va rapidement devenir un succès à l’image californienne suite à l’installation de sa première usine de production et de son siège social à Los Angeles. Le fondateur s’est imposé dans le milieu du prêt à porter pour devenir l’un des plus grand réalisateur de vêtements des Etats-Unis, aux publicités provocantes et aux campagnes sociales progressives (en référence aux tee-shirt “Legalize Gay”). Et ce n’est pas tout; Dov Charney avait notamment pris des positions engagées, comme la défense des droits des immigrés, l’augmentation des salaires minimum, refusant par ailleurs de délocaliser sa production, entièrement réalisée en Californie. American Apparel devient l’apôtre du « made in downtown Los Angeles ». Les vêtements présentés, très basiques, sont reconnaissables à la douceur de leur coton et à leur déclinaison dans une large palette de couleur vives.
American Apparel c’est plus de 285 boutiques, dont 11 en France (9 à Paris), et 10 000 employés. American Apparel possède la plus grosse usine de textile des Etats-Unis et affiche fièrement l’étiquette “Made in USA” sur tous ses produits.
Si le prix des articles American Apparel est élevé c’est parce que Dov Charney a tenu à avoir à ses côtés, en Californie, l’ensemble de ses travailleurs, afin de réaliser des pièces de qualité. Malheureusement pour la marque qui a connu des années de gloire, American Apparel connaîtra sa première crise en 2009. Les prix sont de plus en plus bas et les magasins moins performants qu’à leurs débuts. Si Dov Charney se vante de sa politique environnementale: utilisation de coton bio, recyclage des déchets, énergie solaire et de ses engagements civils; rarement un groupe a fait autant l’objet de polémiques. La marque va être pointée du doigt, en particulier le fondateur, pour son attitude personnelle. Charney sera accusé d’innombrables plaintes pour harcèlement sexuel auprès de modèles de la marque, pour exhibitionnisme dans son usine de Los Angeles, pour s’être masturbé devant une journaliste ainsi que pour des tournage de séances photos pornographiques organisées chez lui.
Le fondateur aurait également été poursuivi pour des salaires impayés, des licenciements abusifs et l’embauche de travailleurs étrangers en situation illégale. En effet, en plus des affaires concernant Charney, American Apparel accumule les pertes, qui se montent à 338 millions de dollars depuis 2010, sans compter les 92,9 millions de dollars de déficit enregistrés au cours des six premiers mois de l’année 2015. Malgré toute ces accusations, Dov Charney garde le soutien de ses employés qui ne veulent pas voir partir l’homme qui leur a permis de travailler et de gagner des salaires honorables malgré leur statut. Les employés recevaient une sécurité sociale ainsi que des bénéfices et American Apparel se vantait “que ses ouvriers du textile étaient les mieux payés au monde, gagnant des salaire pouvant excéder 31 000 euros par an, ou seulement en dessous de 28 600 euros (soit environ un salaire mensuel de 2 400 euros).”
Selon Dov Charney “ce n’est pas une activité qui aurait dû sortir du monde des affaires. Cette activité est sortit du “business” à cause des malfaisances financières de Wall Street.” Vendredi dernier, le directeur des ressources humaines de la marque a quitté la société sans laisser d’adresses pour les questions de la presse et les sites online d’Europe sont maintenant suspendus. American Apparel n’a donc pas encore fait de déclaration officielle, mais ce qui est sûr, c’est que malgré toute les bonnes intentions de la marque, son combat pour le droit des travailleurs immigrés et contre la délocalisation n’aura pas suffit face à la rude concurrence présente dans le monde du prêt-à-porter.
Par Elsa David
[divider]Lire aussi[/divider]