Après avoir emmené Leicester au firmament la saison dernière, signant sûrement le plus grand exploit de l’histoire du foot anglais, Ranieri a été remercié hier par les dirigeants des Tigers. Une décision irrespectueuse et surtout incompréhensible.
Tout a déjà été dit et écrit sur l’épopée de Leicester City, l’équipe qui devait se battre pour le maintien et qui se retrouvera finalement sur le trône d’Angleterre. L’équipe des Vardy, Mahrez, Kanté, Drinkwater ou encore Morgan. Mais les Foxes étaient surtout l’équipe d’un vieux monsieur italien. Un entraîneur de 65 ans qui a décroché son premier titre de champion à Leicester, au terme d’un parcours qui a fait vibrer les fans du monde entier. Un exploit dont on parlera encore dans cinquante ans dans n’importe quel stade du royaume.
Mais on le sait, encore plus dans le football, les histoires d’amour finissent souvent mal. Surtout lorsqu’elles étaient trop belles pour être vraies. En difficulté en Premier League (17ème avec un point d’avance sur Hull City, premier relégable), le Leicester de Ranieri paye la violence des lendemains de fête qui ont trop duré. Entre un mercato raté, des joueurs revenus à leur niveau “normal” et une saison qui s’apparente à une gigantesque gueule de bois, les Foxes n’y arrivent plus. Et c’est le Tinkerman en a fait les frais.
After all that Claudio Ranieri has done for Leicester City, to sack him now is inexplicable, unforgivable and gut-wrenchingly sad.
— Gary Lineker (@GaryLineker) February 23, 2017
Le résultat inespéré obtenu à Séville lors du 8ème de finale aller de Ligue des Champions (2-1) n’aura pas changé la donne pour Ranieri. Dégagé comme un vulgaire technicien de seconde zone par ses dirigeants, l’italien rejoint la liste des entraîneurs de Premier League qui n’ont pas survécu à la saison post-titre (Mancini à City, Mourinho à Chelsea et Pellegrini à City). La différence entre Ranieri et les autres est tout de même de taille. Le romain n’était pas à la tête d’un mastodonte avec l’obligation de terminer au minimum dans le Big Four. Claudio Ranieri dirigeait une équipe qui évoluait encore en Championship il y a trois ans. Une équipe sauvée de la relégation in extremis lors de la saison 2014-2015, avant d’être sacré championne d’Angleterre un an plus tard.
Aujourd’hui, Leicester est tout simplement à sa véritable place. Limoger l’homme qui les a porté tout en haut pour provoquer le fameux “choc psychologique” chez des joueurs aujourd’hui complètement à la rue s’avèrera-t-il être un choix payant ? Dans tout les cas, le manque de respect envers l’homme qui a placé Leicester sur la carte du football mondial demeure scandaleux. Et que dire de ce timing ahurissant ? Aiyawatt Srivaddhanaprabha, président de Leicester, a déclaré que le licenciement de Ranieri était la décision la plus difficile qu’il n’ait jamais eu à prendre dans sa carrière de dirigeant. Difficile de le croire lorsqu’on voit la vitesse à laquelle à été expédiée le renvoi du Tinkerman.
Soutenus par de nombreux confrères (Mourinho lui a notamment rendu un bel hommage en conférence de presse ce matin), Claudio Ranieri paie le prix de la dictature du résultat à court-terme instaurée par les propriétaires de club. Moins d’un an plus tard, le titre de champion semble déjà avoir été oubliée. Les propriétaires thaïlandais ne sont pas là pour regarder avec tendresse dans le rétroviseur. Non, ils sont là pour faire tourner une gigantesque machine économique qui se retrouverait enrayée en cas de descente à l’étage inférieur.
Cette perte de mémoire est assez symptomatique d’un football anglais où l’argent est encore plus roi qu’ailleurs. Ranieri est une victime de ce sytème violent et sans pitié, où l’entraîneur, comme le joueur, n’est qu’un produit comme un autre destiné à bonifier le club. Si il ne remplit plus sa mission à bien, il peut faire ses valises. Même s’il a fait plus que dépasser les attentes quelques mois auparavant.
Le départ de Ranieri vient clore la parenthèse enchantée du football anglais. Rien ne dit que nous reverrons un jour un exploit d’une telle ampleur en Premier League ou ailleurs. Pour cette formidable aventure, pour avoir écrit l’histoire, pour avoir sublimé un effectif médiocre, pour avoir porté Leicester jusqu’en huitième de finale de Ligue des Champions, pour avoir fait chanter Andrea Bocelli sur la pelouse du King Power Stadium, merci monsieur Ranieri.