Si de nos jours, le terme “classique” pour désigner un album est bien souvent sur-utilisé, l’immense Get Rich or Die Tryin’ de 50 Cent n’a pas volé ce sobriquet.
Dévoilé le 6 février 2003 en grande pompe, ce premier album de 50 Cent est, 17 ans après jour pour jour, non-seulement le meilleur album de sa carrière mais aussi l’un des plus gros blockbusters musicaux du XXIème siècle. Des mois précédents son arrivée à l’impact de sa sortie, en passant par sa pérennité dans le temps, cet album réalise un sans faute. Sa qualité intrinsèque est marquée à la fois par des bangers mémorables tels que “In Da Club” ou “Patiently Waiting” en collaboration avec Eminem mais aussi par des balades fantastiques telles que “P.I.M.P” ou “21 Questions” en featuring avec le regretté Nate Dogg. L’album oscille donc brillamment entre le chaud et le froid et offre à l’auditeur un flow d’émotions rares, à l’image par exemple de l’éclectique The Eminem Show de Marshall Mathers, qui est d’ailleurs co-producteur exécutif de l’album.
Sans être un immense technicien au micro ou un lyriciste de premier choix, Fifty délivre au sommet de sa forme et offre une palette vaste de storytelling comme dans le brutal “Many Men” ou de performances vocales comme dans “P.I.M.P” cité plus haut. “In Da Club” reste toutefois à ce jour le plus gros single de l’album.
Get Rich or Die Tryin’ réussit la prouesse de mélanger une brutalité new-yorkaise dans les flows et les textes, tout en apportant, évidemment par l’intermédiaire de l’omniprésent Dr. Dre, une musicalité souvent beaucoup plus West Coast qui permet à l’album de jouir d’une ambiance infaillible. En puisant le meilleur de ces deux univers dans le fond et la forme, 50 Cent a pu sortir le disque le plus important de l’année 2003 et l’un des plus importants des 15 dernières années. Sa relation avec Shady Aftermath fonctionne à merveille et permet à Curtis Jackson, de son vrai nom, de profiter du talent et de l’expérience de Dre et d’Eminem, qui étaient à l’époque sur le toit du monde après les sorties respectives des classiques 2001, The Marshall Mathers LP ou encore The Eminem Show. Les forces en présence sont immenses et le résultat ne manque pas d’être au rendez-vous, tant l’album permet de réaffirmer les codes d’un gangsta rap ultra efficace tout en apportant une musicalité évidente. Des caractéristiques que l’on retrouvera énormément dans les années suivantes chez ses pairs, à l’image de Rick Ross, Young Jeezy, The Game ou encore Booba en France, sur qui l’influence de 50 Cent est palpable. Le 6 février 2003, le gangsta rap s’offrait de nouvelles lettres de noblesse et avait à nouveau droit à une mise en avant de premier plan, ce qui était tout sauf prévisible au passage de l’an 2000. Et même si le rap de “gangster” est aujourd’hui largement en retrait, notamment du fait de l’impact de la discographie d’artistes tels que Kanye West, Kid Cudi ou encore Drake, Get Rich or Die Tryin’ aura le mérite d’avoir tout particulièrement bien vieilli.
Au-delà même de sa qualité intrinsèque indéniable, ce premier album est marqué par un élément rare qui a aussi permis de dynamiser son succès : l’incroyable aura de 50 Cent. Pour rappel, au préalable de la sortie de Get Rich or Die Tryin’, 50 Cent se fait tirer dessus à 9 reprises et passe à quelques centimètres de la mort. Un évènement qui forgera sa légende et, ajouté à son parcours chaotique d’adolescent vendeur de drogue et de hustler new-yorkais parfois sans foi ni loi, rendra Fifty immédiatement unique dans le paysage rap de l’époque. Ajouté à cela son étiquette de « nouveau protégé de Dr Dre » et sa réputation largement forgée à New York à l’aide de ses mixtapes, et le succès planétaire devient alors évident.
Vous l’aurez compris, de sa pochette iconique qui aura tapissé les murs de nombreuses chambres d’ado dans les années 2000 à son image qui aura véhiculé les codes d’un rap souvent caricaturé par les médias grands-public, le personnage de 50 Cent offre un supplément d’âme incommensurable à ce disque. Et forcément, lorsque tous les ingrédients sont réunis, le succès est immense. Get Rich or Die Tryin’ est six fois disque de platine aux États-Unis et s’est vendu à plus de 14 millions d’exemplaires à travers le monde. Un succès immense et symbolique de l’impact dans l’histoire du rap qu’a eu cet album.
Si aujourd’hui 50 Cent est un businessman de talent, capable de faire fortune dans le bitcoin comme dans le monde de l’audiovisuel, il est impossible d’oublier ce qu’il a été dans le milieu du rap par le passé, grâce en grande partie à ce premier album. Cet impact culturel immense, ce témoignage brut d’un mode de vie aujourd’hui beaucoup plus rare dans le rap, ces tubes iconiques des années 2000, pour tout cela et bien plus encore, Get Rich or Die Tryin’ a glané sa place au panthéon du hip-hop.