Josh Luber, fondateur de StockX : “Le resell est l’avenir de la sneaker”

Rencontre avec l'homme qui veut révolutionner le marché de la sneaker.

En seulement trois ans, StockX s’est imposé comme la plateforme de référence pour l’achat/revente de sneakers et de pièces streetwear. Souvent comparé au “Wall Street des sneakers”, StockX vient officiellement de s’implanter en France, un pays possédant une communauté de sneakerheads en constante augmentation. À l’occasion de cette expansion, nous avons eu la chance de nous entretenir avec Josh Luber, qui n’est autre que le co-fondateur de StockX. Rencontre avec l’homme qui veut révolutionner le marché de la sneaker.

D’où vient votre intérêt pour les sneakers ?

J’ai 41 ans, donc j’ai exactement la même histoire que tous les sneakerheads qui ont la quarantaine. J’ai grandi en jouant au basketball à l’époque des Bulls de Michael Jordan. Je voulais vraiment une paire d’Air Jordan, mais mère n’a jamais voulu me l’acheter. La première chose que j’ai faite en ayant mon première salaire ? Acheter une paire d’Air Jordan. On a tous la même histoire, c’est incroyable (rires). Je me souviens, c’était à l’été 1991 que j’ai vu quelqu’un porter une Air Jordan 5 Grape. Ça a été une révélation. Mais je n’ai eu ma première paire que six ans plus tard.

Quel cursus suiviez-vous avant de vous lancer dans l’entrepreunariat ?

J’ai toujours été un mec à start-ups. J’avais lancé 3 autres entreprises en même temps que StockX. J’ai eu des boulots dans des grosses boîtes entre temps. C’est quelque chose qui a toujours été ancré en moi, à l’école j’avais monté un business de collecte et d’échange de cartes de baseball !

Vous travailliez avant de créer StockX ?

Comme je disais juste avant, j’ai lancé 4 entreprises, des expériences entrecoupées par des jobs classiques. J’ai mis la clé sous la porte de la troisième au moment du krach boursier de 2008 et j’ai commencé à travailler chez IBM. J’étais consultant stratégique là-bas, mais j’ai passé la plupart de mon temps là bas à traveiller sur Campless, l’entreprise qui allait devenir StockX. Si vous êtes un entrepreneur et que vous arrivez dans une grosse boîte comme IBM, la première chose que vous faites est de commencer à travailler sur votre projet personnel à côté.

Tout ce qu’on a réalisé, chaque étape, c’est une simple copie du fonctionnement du marché boursier.

Et quand avez-vous commencé à travailler sur StockX ?

On a lancé Campless, l’ancien StockX donc, en 2012. À la base, c’était une sorte de bible des prix de sneakers. On retournait eBay dans tous les sens pour connaître la véritable valeur d’une paire. Ce projet est ensuite devenu StockX. On a commencé à plancher sur cette transformation en 2015, puis le site a été opérationnel en 2016. Tout ce projet remonte donc à 2012, même si le vrai lancement a eu lieu en 2016. C’est assez dingue.

Vous avez douté de la réussite de cette aventure à un moment donné ?

On ne peut jamais prédire ou imaginer un tel succès, mais ce que je peux dire, c’est qu’on a toujours cru en notre idée. C’est une idée qui a toujours été très logique, car elle ne vient pas de nul part. Tout ce qu’on a réalisé, chaque étape, c’est une simple copie du fonctionnement du marché boursier. Les mécanismes de la bourse s’appliquent à tout, à l’essence et aux matières premières, mais aussi aux sneakers, aux pièces streetwear, aux montres ou encore à la maroquinerie. L’idée était vraiment solide. Mais on aurait jamais ou imaginer que l’entreprise deviendrait aussi importante en si peu de temps. C’est une bénédiction.

Quelles sont les leçons les plus précieuses que vous ayez appris avec StockX ?

Si vous échouez, échouez vite. C’est mieux de finir quelque chose que de le rendre parfait. Il faut toujours être en mouvement, proposer des produits, avoir des idées marketing… C’est comme ça que vous aurez des retours et que vous pourrez vous améliorez. Restez enfermé tout seul dans son coin pour créer un produit parfait ne sert à rien. Ce qui sert, c’est d’être toujours en alerte. Il y a plein de fois dans l’histoire de StockX où j’espérais qu’on aille encore plus vite sur certaines choses. Maintenant, même si on continue de grandir, ça reste l’un des mes objectifs personnels : conserver cette vitesse d’exécution dans notre travail, même avec nos 1000 employés actuels.

Comment vous sentez vous vis à vis de cette expansion en France ? Avez-vous un objectif particulier avec ce pays ?

Notre objectif est le même partout : rendre StockX accessible et facile à utiliser. Même nous nous sommes lancés récemment, en février 2016 pour être exact, nous avons eu des acheteurs et des vendeurs à Paris depuis le premier jour. Néanmoins, nous n’avions pas d’ancrage local ici. L’expérience pour le consommateur n’était pas aisée, la plateforme n’étais pas français, il n’y avait pas d’option de livraison adaptée, il n’y avait pas les méthodes de paiement habituelles en France… On a voulu virer ces mauvais aspects, pour créer une expérience locale et simple pour les internautes français. On voulait qu’ils aient leurs produits le plus vite possible, le moins cher possible et que les vendeurs puissent être payés le plus vite possible.

Quel est l’aspect le plus difficile à gérer en tant que dirigeant de StockX ?

(Il réfléchit) Gérer ses équipes. C’est ce qu’il y a de meilleur, mais c’est aussi ce qu’il y a plus difficile, de plus compliqué. Ce n’est pas seulement le fait de manager des gens, ce qui requiert toujours une certaine exigence, il faut aussi trouver et embaucher les meilleurs profils pour votre entreprise. Une entreprise est avant tout une histoire humaine. C’était très difficile pour moi, quand on s’est mis à grandir, de ne plus être impliqué dans les processus de recrutement. C’était la première fois que je n’étais pas à l’origine de l’embauche, que je ne conaissais pas la personne qui allait travailler avec nous. Quand vous avez 1000 employés, vous n’avez pas pu faire un entretien avec tout le monde. Ce qu’il y a de plus dur dans la croissance d’une entreprise, c’est de continuer à recruter les meilleurs.

Voilà la vraie révolution qu’on veut mener : laisser les marques sortir des produits qui ne possèdent pas de prix au retail.

Comment répondriez-vous aux nombreuses critiques sur les prix pratiqués et sur les quantités de sneakers disponibles sur le marché du resell ?

Tout d’abord, je répondrai que les prix en Europe continuent de baisser, car il n’y a plus les fortes taxes sur l’exportation des produits de luxe depuis les États-Unis. Maintenant, quand vous achetez une pièce à Paris, vous aurez 80% de chance de l’acheter à quelqu’un qui habite dans l’Union Européenne, très souvent en France. Il y a quelques temps, cette pièce venait très certainement des États-Unis. Sur un plan plus général, le marché du resell sneaker fixe les vrais prix d’une paire. Le fait qu’une Air Jordan 1 x Travis Scott coûte 175 dollars au retail, c’est un écran de fumée. C’est un rêve, ça n’existe pas vraiment. Maintenant, on paie le véritable prix fixé par le marché.

Si vous étiez obligé de porter une seule paire de sneakers pour le restant de vos jours, de quel modèle s’agirait-il ?

Une Air Jordan 1. Si je devais choisir un coloris, j’opterai pour le Royal ou pour le Lance Moutain White. En vérité, je possède sept paires de Air Jordan 1 Lance Moutain White (rires). C’est évidemment une belle paire, qui possède une identité forte, mais ce que j’apprécie par dessus tout c’est son extra couche de peinture qui la rend plus résistante à la saleté. Quand je voyage à l’étranger pour le travail, je marche beaucoup en ville. Cette couche de peinture est super utile parce qu’elle empêche ma Air Jordan de se salir et ça la rend plus facile à nettoyer. Et bien sûr, c’est une Air Jordan 1. On ne peut pas se planter avec une paire pareille.

Quels sont vos projets pour l’avenir ?

Aujourd’hui StockX est un marché secondaire, où on vend et où on achète des produits déjà existants. On est une sorte de prolongement d’eBay. Le vrai business vers lequel on tend, c’est de travailler directement avec les marques, que ces marques sortent leur produit directement sur StockX, à la manière de l’introduction d’un titre en bourse. Voilà la vraie révolution qu’on veut mener : laisser les marques sortir des produits qui ne possèdent pas de prix au retail. Ces produits sont sur un marché et c’est le marché qui doit définir leur prix. Avoir cette idée d’un futur sans prix au retail, c’est excellent. C’est ce qu’on va essayer de faire.

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