HBO. Trois lettres qui suffisent à faire rêver n’importe quel amateur de série. Depuis plus de deux décennies, cet acronyme rime avec excellence télévisuelle. Offrant au petit écran ses divertissements les plus qualitatifs, Home Box Office jouit d’une réputation unique dans le secteur de l’audiovisuel. Il était donc logique que la chaîne américaine se lance dans l’univers de la SVoD, dans le but de concurrencer Netflix, Amazon Prime et autres Disney+. Annoncé en 2018, HBO Max dispose désormais d’une date de sortie. La plateforme créée par WarnerMedia sera ainsi lancée le 27 mai prochain aux États-Unis. C’est donc un nouveau poids lourd de l’industrie du divertissement qui entre dans la danse, avec de très beaux arguments à faire valoir. Tour d’horizon.
Derrière HBO Max, on retrouve le titan WarnerMedia. Racheté pour 85 milliards de dollars par l’opérateur téléphonique AT&T en 2018, WarnerMedia n’est autre que le numéro 2 mondial du divertissement audiovisuel, seulement devancé par l’indétrônable Walt Disney Company. Conglomérat médiatique majeur, WarnerMedia regroupe des chaînes TV de prestige comme HBO et CNN, les films Warner Bros ou encore l’univers DC Comics. En lançant HBO Max, l’objectif de WarnerMedia est clair : devenir, à terme, le concurrent direct de Netflix. Et pour parvenir à cela, la plateforme s’est donnée les moyens de ses ambitions. Avec un catalogue probablement sans égal en terme de qualité, mais aussi avec un prix d’abonnement largement au dessus de la moyenne.
Concernant le positionnement de son catalogue, WarnerMedia a décidé de jouer à fond la carte HBO. Le nom choisi pour la plateforme en est l’exemple frappant. Pour comprendre ce positionnement, il est nécessaire de se replonger dans l’histoire du network qui a bouleversé les codes du divertissement télévisuel. Né au début des années 70 dans l’indifférence générale, Home Box Office est une chaîne payante, qui a proposé les premiers bouquets sport et cinéma de la télé américaine. HBO inspirera ainsi directement Pierre Lescure, créateur de Canal+, qui reprendra l’idée d’une chaîne disponible par abonnement, basée sur une offre cinéma pointue et sur des retransmissions sportives. Au fil des années 90, HBO construira sa réputation en dévoilant ses premières séries originales. En se lançant dans la production, Home Box Office est animé par une volonté simple : faire du cinéma, en mieux, à la télévision. De cette idée révolutionnaire pour l’époque naîtront des chefs d’oeuvre absolus, comme Les Sopranos, The Wire, Six Feet Under, Entourage, Sex & The City ou encore Oz. Pendant plusieurs années, HBO fait vivre à la télévision un nouvel âge d’or et érige les séries au rang d’art.
HBO envoie alors balader l’éternel complexe d’infériorité du petit écran vis-à-vis du cinéma. En popularisant la figure du showrunner (un créateur de série qui est à la fois auteur, directeur artistique et producteur), la chaîne câblée américaine révolutionne la télévision moderne. De plus, elle jouit d’une aura sulfureuse et intrigante, grâce à des dialogues crus, une violence non-dissimulée et un goût prononcé pour la nudité à l’écran. N’étant pas soumis aux mêmes réglementations que les chaînes gratuites, HBO ose tout. Et ça paye. Ce premier âge d’or ouvrira la voie aux productions ultra-ambitieuses de la dernière décennie, tout en convainquant les stars d’Hollywood que la télévision pouvait, non pas rivaliser, mais bien dépasser le cinéma. C’est donc précédé de cette réputation flatteuse que HBO Max fera ses grands débuts dans un mois.
La plateforme proposera ainsi l’intégralité du catalogue de la chaîne, avec les séries révolutionnaires du tournant du siècle, mais aussi toutes ses productions plus récentes. Des titres comme Game of Thrones, Westworld, True Detective, Euphoria, Watchmen, The Leftovers, Big Little Lies et Boardwalk Empire, pour ne citer qu’eux, côtoieront ainsi les monuments du petit écran cités plus haut. Le catalogue HBO de la plateforme comprendra également des mini-séries acclamées par la critique comme Tchernobyl, The Night Of ou Show Me A Hero, ainsi que des documentaires originaux et divers téléfilms. Pour faire simple, si l’on met de côté Mad Men et Breaking Bad, les meilleures séries des deux dernières décennies seront présentes sur HBO Max. Mais ce n’est pas tout.
Déjà très étoffé grâce à HBO, le catalogue série de WarnerMedia l’est d’autant plus grâce à ses diverses filiales (Adult Swim, The CW, TNT…) et à ses multiples acquisitions récentes, réalisées dans le but de garnir une offre série déjà gargantuesque. Des cartons populaires comme Rick & Morty, The Walking Dead, The Big Bang Theory, Friends, Le Prince de Bel Air, Gossip Girl ou encore South Park seront donc également de la partie. À la fois élitiste et grand public, HBO Max décide de ne pas trancher, en proposant une ligne édito cosmopolite. Et si l’offre série de la plateforme a de quoi faire rêver, son pan cinéma n’est pas en reste. Warner oblige, on retrouvera par exemple les sagas Harry Potter, Le Seigneur des Anneaux et Matrix. Des porte-drapeaux de la pop culture moderne, qui seront soutenus par l’intégralité des productions DC Comics des 40 dernières années. La trilogie des Batman de Nolan sera notamment de la partie, à l’instar de toutes les aventures de Superman, de la Justice League et au Joker de Joaquin Phoenix. HBO Max fera également la part belle à des oeuvres mythiques du septième art comme Citizen Kane, Casablanca ou 2001 : L’Odyssée de l’Espace.
Au total, HBO Max compte proposer un catalogue comprenant plus de 18 000 films. À son lancement, elle n’en proposera néanmoins “que” 2000. Si son catalogue existant est pour le moins consistant, la plateforme de WarnerMedia sera attendue au tournant sur ses créations originales. Ces dernières font pour l’instant cruellement défaut à Disney+, tandis que Netflix et Amazon Prime sont régulièrement critiquées pour la faible qualité artistique de leurs productions propres. Afin d’éviter ces écueils, HBO Max a d’ores et déjà sécurisé une écurie de showrunner reconnu, comme J.J. Abrams (Lost, Star Wars) et Lena Dunham (Girls). Si les créations originales ne seront pas nombreuses lors du lancement de la plateforme, de nombreux projets sont déjà en cours de développement. Une série spin-off du Dune de Denis Villeneuve par exemple déjà été annoncée, à l’instar d’un reboot de Gossip Girl ou encore Flight Attendant, un thriller développé par Kaley Cuoco. HBO Max ne devrait donc pas tarder à rattraper son retard. Reste à savoir si la qualité des programmes exclusifs de la plateforme sera au niveau des standards habituels de la chaîne.
Si les productions originales HBO Max espèrent se différencier de par leur qualité, elles opteront pour un mode de consommation aux antipodes de ses concurrents. La plateforme n’encouragera pas le binge-watching de ses contenus, en révélant un nouvel épisode chaque semaine, à la manière d’une série TV classique. Un pari osé au sein d’une industrie qui ne jure plus que par le le visionnage frénétique. Ce choix à contre-courant s’explique par une volonté de “laisser respirer les séries, au lieu de les consommer à toute allure et de les oublier dans la foulée” selon les mots de Kevin Reilly, responsable des contenus de HBO Max. Ce positionnement haut-de-gamme ayant un prix, la plateforme sera accessible moyennant un abonnement de $14,99 par mois, soit un peu plus de 13€. Un tarif évidemment plus élevé que ses compétiteurs, qui ne devrait toutefois pas refroidir les amateurs de divertissement premium.
Si HBO Max s’annonce comme le nouveau mastodonte de la SVoD américaine, la plateforme devrait être lancée en Europe en 2021. En France, c’est pour l’instant OCS qui bénéficie des droits de diffusion des programmes HBO, tandis que le reste du catalogue de la Warner est éparpillé entre les différents services de streaming. On ne peut toutefois qu’espérer une arrivée de HBO Max dans l’Hexagone, son catalogue extraordinaire, son prestige historique et ses parti-pris artistiques étant des plus excitants.