Créateur de contenus, vidéaste, humoriste, Just Riadh a parcouru beaucoup de chemin avant de devenir un it boy. Un visage qui plaît désormais aux Maisons de mode, comme aux réalisateurs.
Son surnom est à l’image de la personne qu’il aspire à être. Simple, comme sa mère qui lui a tout appris et dont il est fier : “Son coeur est blanc”. Plus tard, il aimerait lui ressembler. Pour l’heure, il semble être sur la bonne voie, lui qui défend avec ardeur la sympathie et la joie comme lignes de conduite : “Ça ne coûte rien, il faut juste être sympa”.
2017. Just Riadh débute sur Instagram à une époque où la plateforme est dominée par des contenus essentiellement photographiques. La proposition du jeune créateur détonne et dénote. Au moyen de courtes vidéos de quelques secondes, il parvient à faire rire des millions de personnes. Progressivement, il devient une figure incontournable du French Instagram. À tel point qu’il est choisi par le réseau social pour participer à l’opération “Creators around the world”. Du Japon au Brésil en passant par les Etats-Unis et l’Espagne, Just Riadh s’engage dans un voyage initiatique aux côtés de créateurs de contenu du monde entier. “Tu rencontres quelqu’un qui fait comme toi mais autre part, c’est super intéressant.”
Du haut de ses 24 ans, Just Riadh veut s’essayer à tout. Sans jamais rien regretter. En 2023, il s’allège de son préfixe pour épouser de nouveau son patronyme. Just Riadh devient Riadh Belaïche au cinéma et décroche son premier rôle sur grand écran. Une nouvelle corde à son arc déjà bien garni. Elle lui offre aisance et sérénité lorsque l’objectif du photographe le capture sous tous ses angles. Entre deux looks Louis Vuitton, Riadh excelle dans l’art qu’il maîtrise le plus. Celui de faire rire les gens. L’atmosphère est légère, détendue, presque enfantine. La discussion peut débuter.
Dans une précédente interview tu expliquais : “J’ai 24 ans et je crois que j’ai le meilleur scénario possible et imaginable”. Plus petit, tu avais conscience de ce qui t’épanouissait ?
En vrai non, même pas (Rires : ndlr]. Quand les gens te posent cette question, tu es obligé de trouver un truc. En interview on te demande souvent “Petit, tu avais déjà ça en toi ?”.
La vérité c’est que non, quand tu es petit tu essaies juste de te faire aimer et accepter par les gens. Donc quand tu n’es pas le plus beau du collège, ni le plus riche, c’est-à-dire quand tu es juste un mec normal, le seul truc que tu peux faire, c’est le clown.
À cette époque là tu ne devais pas t’imaginer poser dans un total look Louis Vuitton devant un photographe…
Pas du tout (Rires) ! Même quand j’ai commencé à faire des vidéos, tout ça c’était loin. Les grandes marques de luxe, c’était à des années lumières. Le milieu de la mode s’est penché sur le sujet des personnalités d’Internet très tardivement. C’est normal, ils investissent sur des profils et il faut que ça soit rentable pour eux. Des marques comme Louis Vuitton, Dior ou Prada n’ont pas besoin des créateurs de contenu pour fonctionner en vérité. Du coup, de mon point de vue, quand une marque vient te voir c’est parce qu’elle pense que ce que tu dégages ça rentre dans son ADN et que ça peut coller.
Pour moi c’était vraiment une fierté de me dire que je suis arrivé là en restant toujours moi-même. Je n’ai jamais changé pour faire une collab’ avec une marque. J’ai toujours gardé mes valeurs et mes principes. Du coup, me dire que je peux travailler sur des gros projets tout en restant fidèle à ma personne, ça me rend fier.
Les gens pensent souvent l’inverse. Ils se disent “S’il a fait ça, c’est qu’il s’est vendu”, “Il a signé un contrat avec le Diable”. Moi je suis très content d’être arrivé là intègre, je suis toujours là chez moi, avec ma famille, mes potes, mes habitudes.
Ton entourage n’a pas changé non plus ?
Mon cercle proche ne bouge pas. C’est très rare que quelqu’un intègre mon cercle très proche. Tu rencontres tellement de monde. Il y a des gens qui rentrent dans ta vie mais ils peuvent repartir d’un coup donc ça ne sert à rien de s’attacher à des gens, créer des relations fortes alors que du jour au lendemain, tout peut se stopper. Mais c’est la vie, tout fonctionne par intérêt en soi. Les gens viennent prendre quelque chose chez toi et inversement.
Le fait d’avoir connu les lumières, ça t’a rendu méfiant ?
Je ne suis pas méfiant mais je fais attention à certaines choses. Maintenant je suis capable d’identifier les intentions derrière les approches des gens. Avec le temps, ton nez s’affine et tu arrives à très vite faire le tri.
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Ça t’est arrivé de faire des passes D à des créateurs ?
Moi j’en fais de ouf. Je fais ça parce que j’aurais kiffé qu’à mes débuts des mecs qui ont atteint un certain cap me fassent une passe D. Je me dis que ça ne coûte rien, si ce n’est peut-être dix ou quinze minutes de ton temps.
Et puis, c’est pas parce que tu arrives à un niveau où tu dépasses les gens qui, à tes débuts, t’ont tendu la main, qu’il faut forcément dire “Maintenant j’en suis là, j’ai plus le temps”. Tu n’as plus le temps de quoi (Rires) ? On est tous des êtres humains, on se lève le matin, on dort, on mange, on va aux toilettes, il n’y a pas à adopter une posture ou être prétentieux. C’est important d’être reconnaissant, ça se fait rare et je trouve ça très noble. Plus tard, quand j’aurais 60 ou 70 ans, j’ai envie de pouvoir regarder derrière moi et de voir que c’est propre, que j’ai été clean et correct avec les gens. C’est tout ce que je veux.
Quelles sont les personnes dont tu es le plus reconnaissant ?
Mes parents resteront les numéros 1. Et dans l’industrie, la première personne avec qui j’ai vraiment collaboré, c’était Galo Diallo, le fondateur de Smile [agence de développement artistique et d’accompagnement de créateurs de contenu]. Encore aujourd’hui on travaille sur plein de projets ensemble, même hors création de contenus comme par exemple de l’associatif, du cinéma etc.
Tes parents ça a été ta réponse instinctive. Par le passé tu as dit “Les gens ne se rendent pas compte à quel point c’est difficile de changer de culture et de pays. Mon père était ingénieur en Algérie, il s’est retrouvé à nettoyer le métro à Paris”.
Normal ! C’est chaud quand même. Dès fois peut-être qu’on oublie parce que nous on vit au jour le jour, on ne réfléchit pas, on pense toujours à la suite ; qu’est-ce-qu’on va faire demain, qu’est-ce-qu’on va faire l’année prochaine, c’est quoi les projets ? Etc. Aujourd’hui tout va vite mais il ne faut pas oublier que si on est là aujourd’hui, c’est grâce à nos parents qui ont sacrifié leur vie. Pendant leur vingtaine ou trentaine, eux, ils se sont dit : “Au lieu de profiter de notre vie, à une période où tout le monde répète qu’il faut profiter, on va faire un sacrifice, on va changer de culture, changer de pays. On va aller là-bas parce que pour nous, là-bas, nos enfants pourront mieux grandir. Ils auront une meilleure structure, seront mieux accompagnés”. Je ne dis pas qu’en Algérie on ne peut pas grandir correctement mais nos parents voyaient pour nous un avenir plus prometteur en France, avec plus de possibilités et un champ de vision un peu plus large.
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Ce sont des discussions que tu abordes avec tes parents ?
Justement, il n’y a pas longtemps, je sortais du cinéma où j’étais allé voir La Famille Asada qui est inspiré de la vraie vie. C’est l’histoire d’un gars qui a un don pour la photographie. Il voyage dans plein de pays et quand il retourne chez ses parents, il demande à son père : “Papa est-ce que t’es heureux?”. Il répond “Oui, vous êtes en bonne santé, vous travaillez.” Et son fils creuse un peu en lui demandant : “Mais est-ce que tu es devenu la personne que tu voulais être ? C’était quoi ton rêve ?”. Son père lui répond pompier. Du coup, pour réaliser le rêve de son père, il est parti chercher un camion pour faire un shooting devant la caserne. Il a ramené toute sa famille sur la photo pour mettre en scène le rêve de son père. À mon tour, après avoir vu ce film, j’ai demandé à mon père ce qu’il voulait faire quand il était petit. Sans dire que je vais refaire ce qu’a fait le fils dans La Famille Asada mais juste par curiosité (Rires). C’est une question importante à poser parce que nous on connaît l’histoire de nos parents une fois qu’on est nés. Mais avant ça, ils ont eu notre vie, comme nous aujourd’hui.
Qu’est-ce-que ton père t’a répondu ?
Il faisait du handball avec l’équipe nationale d’Algérie. Il faisait un peu ça illégalement dans le sens où il ne prévenait pas ma famille quand il partait, il leur mentait pour jouer. En même temps il était à l’école et parfois il s’absentait pendant longtemps.
Et ta mère ?
Elle était prof de français en Algérie mais elle m’a dit que son rêve c’était d’être coiffeuse.
C’est encore possible !
Oui parce que quand tu réfléchis c’est pas les trucs de ouf que nous on pouvait dire genre footballeur, acteur, chanteur etc. Mes parents avaient des envies simples qui étaient motivées uniquement par l’idée de faire ce qu’ils aimaient, au-delà de penser à combien ça va rapporter.
Je te parle aussi de ça parce que c’est une réalité que, dans certaines familles immigrées, il y a une forme de tabou autour de “la vie d’avant”.
Pas chez nous en tout cas ! On est grave peace avec ça. Et puis il y a aussi que moi j’ai une relation très transparente avec mes parents. Il y a des familles où les enfants semblent avoir un manque de communication. C’est une pudeur qui bloque certains sujets et qui fait que tu ne peux pas parler de plein de choses avec tes parents. Moi je n’ai pas cette limite. Après forcément, il y a des sujets où tu ne vas pas aller (Rires). Mais si j’ai une question à poser à ma mère ou mon père, je vais avoir aucun mal à le faire. Ils sont très ouverts d’esprit.
Tu saurais expliquer les valeurs qu’ils t’ont transmises ?
Ma mère, ça n’était pas tant avec des mots mais c’était quand je la voyais se comporter avec les gens. C’est la personne la plus gentille, son coeur est blanc. Je crois que je ne l’ai jamais entendue parler mal de quelqu’un. Des fois, même si j’essaie de me mettre à sa place, je n’arrive pas à la comprendre. Elle a une vie archi simple, elle se lève le matin. Elle prend son café, elle joue avec les chats après elle va dans la cuisine, elle fait ses petits gâteaux, elle s’entraîne etc. C’est vraiment en elle que je vois des valeurs où je me dis si j’arrive à atteindre ce niveau là un jour dans ma vie, je suis bien, je suis tranquille.
Ce niveau de sagesse ?
Ouais vraiment, 100%. Après je pense aussi que nous, cette génération Internet, on est trop matrixés. Même si tu ne le veux pas au fond de toi, tu seras quand même focus sur ce que les gens pensent. On a du boulot…
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En parlant d’Internet, tu peux me dire deux mots à propos de tes débuts sur Instagram ?
J’avais 19 ans au moment de ma première vidéo sur Instagram. J’étais parmi les premiers à faire des vidéos sur la plateforme. Avant, c’était que des photos en vrai. J’ai commencé à faire des snaps, des petites vidéos courtes qu’on s’envoyait entre potes. Un jour, un pote à moi a mis un truc sur Facebook et moi à ce moment-là j’étais en année sabbatique. J’ai fait un BTS NRC, j’ai arrêté au bout de deux jours. Je ne faisais rien à part des petits boulots pour gagner un peu d’argent, donc je me suis dit que je n’avais rien à perdre. Finalement, un petit truc s’est créé et j’ai continué sans lâcher.
Quand tu t’es lancé sur Instagram, tu étais déjà dans cette optique de créer des vidéos humoristiques?
Ouais vraiment, et c’est toujours le cas. On est entre potes, on se dit : “Ça serait marrant de faire ça” et on y va ! Aujourd’hui, je fais des trucs plus poussés et plus gros mais pour moi c’est important de garder cette base, cette spontanéité. T’es là pour t’amuser !
C’est une plateforme qui te permet de développer toutes tes idées?
Ouais vraiment, c’est la plus complète, tu peux tout faire dessus; stories, reels, live. C’est rapide, fluide et tout en un. En tout cas pour mon cas personnel, par rapport au contenu que je produis, c’est la plateforme sur laquelle je suis le plus présent.
Ton rapport à Instagram a évolué en quatre ans ?
Complètement, surtout dans ma manière de penser mes contenus. Au début, sur mes premières vidéos, je réfléchissais beaucoup à travers le prisme des likes. Je me demandais : “Est-ce-que si je fais ça, j’aurais des J’aime ou des vues?”
Donc je trouve que le fait d’avoir retiré de manière optionnelle les J’aime sur les publications, c’était le meilleur move possible de la part d’Instagram. C’était un cap très important pour les créateurs de contenu. Sinon je pense que les gens seraient devenus fous. Il y aurait eu tout le temps le même contenu parce qu’en vrai les gens auraient fait ce qui fonctionne et pas ce qu’ils aiment vraiment. Et même du côté des utilisateurs, parfois tu regardes une vidéo, tu ris, puis tu regardes le nombre de likes. S’il n’y en n’a pas beaucoup tu te dis : “Mais pourquoi j’ai rigolé à ça ?” (Rires). C’est un facteur qui modifie complètement la perception d’un contenu.
Tu penses que c’est quoi les conséquences des réseaux sociaux dans nos vies?
Aujourd’hui les réseaux font partie intégrante de nos vies. Le téléphone c’est une troisième main (Rires). Même nos doigts changent et développent des bosses à force d’utiliser nos téléphones. Tu captes le délire ? C’est pour te dire à quel point aujourd’hui on ne peut pas faire autrement. Il y a des gens qui vont te dire qu’ils sont anti réseaux sociaux mais franchement tu es obligé aujourd’hui ! Les billets d’avion c’est sur ton téléphone. Quand tu reçois quelque chose par mail, tu dois utiliser le cryptogramme. Même pendant le COVID, notre pass vaccinal pour se déplacer était sur nos téléphones! Le Président de la République a dit : “Téléchargez l’application anti-covid”. Donc oui aujourd’hui on est vraiment tous et toutes dedans et je ne sais pas comment ça va se terminer cette histoire.
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C’est pesant parfois pour toi de devoir documenter toute ta vie ?
Non parce que je montre seulement ce que je veux. C’est impossible de tout filmer H24, ça serait horrible même. Instagram et les réseaux sociaux en général, les gens ont l’habitude de ne montrer que le bon côté et c’est bien pour ça que ça crée des gens qui sont en bad mood ou en dépression. Devant ton téléphone, tu es sans cesse dans la comparaison. Les gens peuvent se dire “Lui il est là-bas, il mange ça, il est habillé comme ça”.
Tu ne trouves pas que, de plus en plus, les gens sont conscients du fait qu’Instagram n’est pas la vraie vie ?
Oui complètement. Et je pense que c’est important. Ça montre aussi que tout le monde n’est pas là en train de kiffer sa vie là-bas, en train de manger dans ce bête de restau. Il y a aussi des gens qui sont là, qui sont peut-être en train de pleurer parce qu’ils se sentent seuls. C’est bien de montrer les mauvais côtés aussi. On est des êtres humains avec des émotions. On n’est pas juste contents et heureux. Il y a d’autres trucs.
Aujourd’hui les voyages occupent une place assez centrale dans ton contenu alors qu’au début tu créais principalement en direct de ta chambre. Est-ce-que c’est nécessaire pour toi de voyager pour te renouveler ?
J’ai toujours voulu voyager. Quand j’étais petit, le seul voyage que je connaissais c’était l’Algérie et encore, on essayait d’y aller au moins une fois tous les deux ans. J’ai toujours kiffé prendre l’avion. Pour moi c’était un truc de ouf. J’aime trop l’ambiance des aéroports (Rires). Je peux même aller à l’aéroport comme ça pour me poser, me balader. Après en vrai je force parce que la partie la plus fun c’est quand tu passes les portiques à l’embarquement. C’est un moment hors du temps. Je pense sincèrement que le meilleur truc que tu puisses faire dans ta vie, c’est les voyages. Découvrir de nouvelles choses, de nouveaux endroits, de nouvelles personnes. Je pense que j’en ai besoin. Comme tu dis, j’ai commencé à faire des vidéos où je réagissais juste à des life hacks. J’avais plusieurs tee-shirts, je les retirais, je les balançais. Ça va faire cinq ans que je fais des vidéos. Imagine si pendant cinq ans je n’avais fait que ça. Je pense qu’au bout d’un an, j’aurais saoulé les gens. C’est ça qui est bien aussi avec les réseaux, c’est qu’il y a un perpétuel renouvellement avec de nouvelles têtes qui arrivent, de nouveaux contenus, nouveaux usages. Je trouve ça hyper bien et ça donne de l’air frais. Moi, le fait de voyager par exemple, ça me permet de m’aérer l’esprit. Je peux montrer des trucs que les gens ne peuvent pas forcément tous voir. Par exemple quand j’étais en Corée du Sud, j’ai rencontré des gens, j’ai de la chance d’avoir certains accès. Voyager, c’est le meilleur truc.
Tu participes d’ailleurs au programme Creators Around The World d’Instagram [une opération inédite impulsée par le réseau social qui consiste à partir à la rencontre de créateurs du monde entier pour découvrir de nouvelles cultures et créativités]. Peux-tu me dire deux mots de cette initiative ?
C’est un projet qu’on bosse depuis un moment avec Instagram et Smile. Au début, on avait un concept qu’on a déplacé sur plein de pays différents. Avant ça, avec Instagram on était parti à une sorte de convention à Los Angeles qui réunissait plein de créateurs du monde entier. Là je me suis dit : “Il y a des mecs d’Instagram, comme moi, mais d’un autre pays”. Tu rencontres quelqu’un qui fait comme toi mais autre part. C’est super intéressant du coup. Mais c’était court, c’était le rush. Du coup on s’est demandé pourquoi on n’irait pas à la rencontre de ces créateurs, parce que moi par exemple je me demande comment ils travaillent. Par exemple, j’étais parti à Tokyo et en fait là-bas tu te rends compte qu’Instagram au Japon c’est pas pareil qu’Instagram en France. On ne se rend pas compte à quel point Instagram s’est développé en France. Des créateurs de contenu japonais, il n’y en a pas beaucoup en vérité. Le plus gros compte japonais que j’ai vu sur place, c’était un groupe de filles qui dansaient en salopettes. Et elles ont genre 400 000 abonnés.
C’est pas du tout les mêmes délires que nous. Eux ils sont beaucoup branchés danse, musique etc. Moi je n’ai pas vu de mecs qui font des blagues par exemple. Ça n’a rien à voir avec ce qu’on fait en France. Bientôt avec Instagram, on va partir au Brésil et j’ai encore plein de questions à leur poser ! Plein de choses à apprendre, à savoir.
L’un de tes voyages à la Mecque a fait l’objet d’une vidéo dans laquelle tu présentes en détail l’accomplissement de l’un des cinq piliers de l’islam : le pèlerinage. Comment t’es venue l’idée de cette vidéo ?
J’hésitais à la faire au début. J’en parlais avec Galo et c’est en ça qu’il a une place fondamentale dans mon quotidien. On discute de tout en pesant à chaque fois les pour et les contre. Au final je me suis dit, je fais ce que je veux. Il y a des gens qui peuvent se dire qu’en faisant un contenu comme ça, ça va leur fermer des portes ou ça va les observer d’un œil négatif. C’est dommage de penser comme ça alors qu’en fait c’est la manière dont tu amènes le truc qui est importante.
Tu peux ramener de la spiritualité dans ton contenu si tu le fais correctement, si tu expliques bien les choses. Dans la vidéo, quand je filmais et que je parlais, je me disais “Là je parle aux gens comme s’ils ne connaissaient rien”. Je ne me suis pas dit que j’allais parler à des musulmans. J’ai voulu faire une vidéo à la fois immersive pour que les gens aient l’impression d’être auprès de moi, et à la fois discrète pour ne pas trop me faire remarquer à la Mecque. J’ai trouvé ça trop bien et même moi quand je la re-regarde ça me fait un souvenir avec ma famille. J’ai toujours voulu emmener ma famille là-bas. Quand je suis parti la première fois, ça m’a fait beaucoup de bien et je me suis dit que j’allais y aller au moins une fois par an. Ça te nettoie intérieurement, ça te vide. Et même d’y aller vers la fin d’année c’est une bonne manière pour faire le point sur ton année écoulée et débuter ta nouvelle avec des bonnes ondes. C’est l’une des meilleures vidéos que j’ai faite.
Faire cette vidéo c’était aussi une manière pour toi de montrer qu’on pouvait faire le pèlerinage jeune ?
La première fois que je suis parti c’était avant le Covid et c’est là que j’ai capté que cette histoire selon laquelle il faudrait y aller à 60 ans lors de ta retraite, c’est un peu un mythe. Quand tu regardes, ça ne coûte pas forcément plus cher qu’un voyage en Thaïlande (Rires).
Les gens imaginent trop que c’est un truc de ouf, que c’est compliqué etc. Les gens se disent : “Quand j’y vais, il faut que je sois prêt, il y aura un avant et un après. Je me rangerai etc.” Alors qu’on est tous des êtres humains, on fait tous des erreurs dans la vie, on ne va pas arrêter. Après bien sûr, en rentrant tu peux avoir envie de t’améliorer, d’être une meilleure personne, une meilleure version de toi-même, arrêter les choses qui te freinent dans la vie. Parfois je reçois des messages de mecs de quarante piges qui me disent qu’ils ont vu ma vidéo et qu’ils partent en pèlerinage avec leur famille. Moi ça me fait trop plaisir d’entendre ça, je me dis que cette vidéo aura servi à quelque chose. Le plus important pour moi dans la création de contenu, au-delà de divertir les gens, c’est qu’il faut que ce que tu fasses ça serve.
T’avais dit que l’un des trucs les plus importants pour toi, c’est de laisser une trace.
Oui, j’aimerais que les gens se souviennent de moi comme étant quelqu’un de bien et pas en mode chelou. Tout le monde va partir un jour, tout le monde va mourir c’est normal mais juste j’aimerais que les gens aient de bons souvenirs de moi, pas des trucs sales. C’est relou sinon. Moi je veux juste qu’on dise “Ouais Riadh, c’était un bon gars, il était cool, il avait une bonne énergie.”
Ta conception de quelqu’un de bien est principalement centrée sur la sympathie, le fait d’avoir une bonne énergie.
C’est le truc le plus simple et le plus efficace que tu puisses donner à quelqu’un dans une journée. Selon ton comportement et ta bonne énergie, tu peux changer la journée de quelqu’un qui ne se sent pas bien. C’est un truc que tout le monde peut offrir, tu ne sors pas un billet de ta poche (Rires). C’est toi, ton attitude, tes mots, ton comportement. Personnellement, c’est vraiment un objectif que j’essaye de me fixer. Quand je sors de chez moi et que je suis amené à communiquer avec des gens, je veux que ces gens-là passent un bon moment. Je ne veux pas qu’ils se disent “Ah ouais j’ai vu un gars tout à l’heure, c’était relou”. C’est simple. Si tu te mets ça en tête tu te dis que ça ne coûte rien, il faut juste être sympa. En vrai si tu es aigri, reste chez toi, joue à la play, regarde une série ça va passer (Rires). Ne fait pas profiter les autres de ton aigreur.
Surtout que les bonnes énergies se multiplient entre elles.
Oui c’est ça ! Si quelqu’un te voit et se dit “Purée c’était cool”, il va réfléchir et finir par se demander : “Pourquoi je suis aigri ?” Même moi ça m’est déjà arrivé, parfois tu t’inventes des moods. Quand j’étais au lycée par exemple, je me mettais des matrix bizarres (Rires). Je me levais le matin en me disant “Aujourd’hui je parle à personne”. Tu es là, dans le bus avec tes écouteurs, il y a les gens qui passent, tu arrives devant ta salle toujours dans ce même état d’esprit. Et là, il y a un mec qui passe et qui est de bonne humeur, qui est content et fait rire tout le monde. Et tu te regardes deux secondes et tu te dis “Mais en fait ce que je fais là c’est n’importe quoi” (Rires). Tu veux te donner quel rôle, quel personnage en ne parlant à personne comme ça ? Que tu es mystérieux, ténébreux ? Ça n’a aucun sens (Rires). Autant être de bonne humeur.
Photographie : Moïse Luzolo
Assistant photographie : Félix Devaux
Direction artistique : Iris Gonzales
Coordination artistique : Luca Delombre et Naël Gadacha
Stylisme : Iris Gonzales et Luca Delombre
Production : Selim Moundy et Alice Poireau-Metge
Make-up : Océane Susini
Interview : Nouma Ben
Graphisme : Noémi Bonzi