Alors que Paloma Elsesser vient d’être élue mannequin de l’année aux Fashion Awards 2023, sa nomination suscite de vives critiques sur la toile, témoignant de la grossophobie encore ancrée dans la société. Le triomphe du mouvement body positive, et la représentation des mannequins plus size, qui ont contribué à rendre la mode plus inclusive, semble ne plus être d’actualité.
L’avénement du “body positive”
Pourtant, ces dernières années, l’industrie de la mode paraissait favorable à s’éloigner des standards de beauté qu’elle avait imposé à la société. Doucement, mais surement, la taille 0 partageait les podiums avec une nouvelle génération de mannequins plus size, ouvrant la voie à plus d’inclusivité. On compte parmi elles, Alva Claire, Ashley Graham, Paloma Elsesser, Jill Kortleve ou encore Precious Lee. Ces icônes de mode se positionnent en tant que personnalités médiatiques, militant pour la diversification des corps modèles et incarnant les valeurs du body positivisme. Depuis leurs succès, les marques s’entendent à évoluer les standards de tailles en élargissant leur gamme, et les magazines s’ouvrent à représenter des mannequins plus size. Malgré le succès de ces nouvelles égéries, prônant la positivité corporelle et l’acception de soi, la règle de la minceur est toujours fortement recommandée dans la mode.
La glamourisation de la maigreur
On observe un retour inquiétant des nouvelles esthétiques Y2K et heroïn chic sur les catwalk. Ces tendances, portées par des grands noms de la mode telles que Miu Miu, Coperni, Blumarine ou encore Givenchy, sonnent la fin de l’avènement du mouvement body positive. Glamourisation de la maigreur extrême, ces silhouettes sont très controversées, car l’esthétique est souvent associée à la drogue et aux troubles du comportement alimentaire. Une image et un mode de vie problématique, qui ont tristement trouvé ses égéries 2023, à l’instar de Kim Kardashian, Bella Hadid ou Lila Moss, pour ne citer qu’elles.
Bilan alarmant de la Fashion Week SS24
Le constat dressé par les statistiques de l’étude menée par Vogue Business lors de la saison Printemps/Été 2024 n’arrange rien. Une nouvelle fois, les mannequins plus size sont très peu représentées sur les podiums, comme l’ironise Paloma Elsesser dans le podcast Pretty Big Deal animé par Ashley Graham « les opportunités professionnelles sont plus minces ».
Sur les 9 584 modèles présentés lors des 230 défilés à New York, Londres, Milan et Paris, seulement 0,9 % étaient des mannequins grandes tailles (44 et +), 3,9 % des mannequins tailles moyennes (38-44) et 95,2 % des mannequins minces (maximum 36). Il s’agit d’une légère amélioration par rapport à l’AW23, où 95,6 % des looks étaient en taille mince, 3,8 % en taille moyenne et 0,6 % en taille forte. Ces données restent d’autant plus alarmantes lorsque l’on sait que la taille moyenne d’une femme est bien supérieure à un 36. En France par exemple, elle se stabilise autour du 42 si on se base sur la dernière campagne de mensuration nationale organisée par l’Institut français du textile et de l’habillement (IFTH). « L’acceptation de mon corps n’est toujours pas totale, je n’ai pas un rapport totalement sain avec l’alimentation » explique Maud Lefort, ancienne mannequin, citée par franceinfo. « Cela flingue les jeunes filles qui vont nous regarder. Cela crée une image complètement inatteignable. C’est absolument choquant et c’est triste », conclut-elle. La diversité morphologique dans la mode semble connaître des vagues, faites de creux et de résurgences.
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