Ce mardi, la direction sportive de Manchester United a enfin pris la décision de se séparer de son coach José Mourinho, 2 ans et demi après son arrivée dans le nord de l’Angleterre. Humiliés par leur rival historique Liverpool ce week-end, les Red Devils pointent à une médiocre 6e place en Premier League, à 11 points du 4e spot synonyme de qualification en Ligue des Champions. A deux mois de l’affrontement face au PSG dans cette même coupe d’Europe, le débarquement du “Special One” semblait inéluctable.
Au-delà de l’échec humain et sportif du Portugais, ce nouveau changement de manager est l’illustration d’une réelle incapacité du club à reconstruire sur des bases saines depuis le départ de Sir Alex Ferguson en 2013. Aucun technicien n’est pour le moment parvenu à succéder durablement à “Fergie” sur le banc mancunien, ayant pour effet direct des résultats en très net recul et une perte de vitesse sportive incontestable. Un drame quand on connait la ferveur locale et le fait que United soit le club de football ayant la plus forte valorisation financière au monde.
Transition ratée
Alors que Ferguson a régné pendant 23 ans sur le football anglais, ce sont pas moins de 3 coachs qui se sont relayés sur le banc d’Old Trafford en 5 saisons et demi, un cruel manque de stabilité pour une organisation longtemps habituée à la sérénité. Car le problème se situe bel et bien là pour Man U, dont la période de transition semble s’éterniser, provoquant la colère de fans pourtant parmi les plus fidèles du Royaume. Ferguson avait fait du club une véritable institution dans laquelle les égos de chacun devaient passer au second plan, ses successeurs auront quant à eux plutôt accumulé les polémiques.
Tout semblait pourtant bien parti avec la nomination de David Moyes à l’été 2013. Performant avec Everton, il semblait le candidat idéal pour repartir sur un nouveau cycle. Ecossais comme Sir Alex, Moyes avait également l’avantage d’être un homme dans la continuité de son prédécesseur et disposé à s’inscrire sur le long terme après 11 saisons à la tête des Toffees. Le costume s’est finalement avéré trop large et faute de résultats il s’est fait licencié à quelques semaines du terme de l’exercice 2013-2014, remplacé par Ryan Giggs le temps de quelques semaines. Une saison difficile pour les supporters et le club, mais Moyes n’a eu que peu de temps et de crédit pour réellement installer ses idées et sa philosophie au sein d’un club marqué par la culture de la gagne.
Coachs éphémères
C’est à ce moment-là que les choses sont réellement devenues compliquées pour les Diables Rouges. Après une saison de transition très décevante, les dirigeants ont alors cédé à la panique plutôt que de laisser sa chance à l’intérimaire Ryan Giggs, pourtant cadre emblématique de l’époque Ferguson. C’est alors Louis van Gaal qui a débarqué en ville au terme d’une Coupe du Monde réussie avec les Pays-Bas. Entraîneur très colérique, le Néerlandais est bien trop stricte pour mener un projet durable dans le football moderne où les joueurs ont le contrôle. Au cours de ses deux saisons en Angleterre, Van Gaal aura connu un succès plutôt relatif (vainqueur de la Coupe d’Angleterre) et quelques fortes désillusions comme une défaite 4-0 en Coupe de la Ligue face à Milton Keynes Dons, pensionnaire de troisième division. Lui non plus n’aura pas réussi à relancer le club mythique de Manchester, proposant un jeu fade malgré des dépenses faramineuses sur le marché des transferts.
Alors que l’on pensait la famille Glazer, propriétaire du club, vaccinée des entraîneurs ingérables, ces derniers ont une nouvelle fois cédé aux sirènes de la hype en engageant le sulfureux José Mourinho. On connait la suite. Malgré les succès presque anecdotiques en Ligue Europa et en Coupe de la Ligue, le passage du Portugais aura surtout été marqué par ses conflits ouverts avec certains cadres du vestiaire comme Paul Pogba, ainsi qu’avec les supporters. Au-delà de ses frasques habituelles, Mourinho semblait réellement avoir perdu toute lucidité, son équipe proposant un jeu proche du néant. Victime d’une crise d’égo depuis la “manita” reçue par le Barça en 2010, le “Special One” a perdu le fil et n’y arrive plus. Reste à voir où il parviendra à rebondir à seulement 55 ans.
Un effectif inconsistent
Si Manchester United est dans une situation si instable, c’est également à cause de recrutements manqués par l’encadrement du club et les coachs successifs. On peut notamment noter l’erreur Memphis Depay, incapable de s’adapter à un club de ce standing ou encore l’achat d’Anthony Martial pour près de 100 millions d’euros après seulement une poignée de matchs avec Monaco en Ligue 1. Le club a également fait revenir Paul Pogba au bercail, pour 105 millions d’euros. Le niveau sportif du milieu français n’est pas à remettre en question, mais le club l’avait laissé partir libre 4 ans plus tôt vers la Juventus de Turin … Le niveau individuel de nombreux joueurs de rotation est également mis en cause du côté des Red Devils, à l’image de l’ancien capitaine local Roy Keane, qui estime qu’une bonne partie de l’effectif n’a pas sa place dans un club de cette envergure. Ce déséquilibre dans l’effectif malgré un budget très important n’est pas digne d’une équipe comme Manchester et dénote d’un problème de travail de fond effectué par ce club depuis plusieurs années.
Et maintenant ?
Désormais, place à une nouvelle phase de transition puisque le club a annoncé qu’un entraîneur prendrait le relais pour la fin de la saison. Celui-ci devrait être le Norvégien Ole Gunner Solskjaer, ancien super sub de l’équipe à la fin des années 1990 et début des années 2000. Il est en revanche peu probable que “Baby Face Killer” prolonge au-delà de cet intérim puisque la direction mancunienne a annoncé qu’ils souhaitaient profiter des six mois à venir pour mener un processus de recrutement approfondi et ne pas réitérer les erreurs du passé concernant le choix du futur manager.
Sur la liste des potentiels coachs, deux profils se détachent très largement. Notamment celui de Zinédine Zidane, qui après une saison de break sera à la recherche d’un nouveau challenge à la rentrée. L’actuel boss de Tottenham Mauricio Pochettino a également un très belle côte en Angleterre et souhaiterait tenter un nouveau défi au terme de l’exercice en cours. Le nom de Leonardo Jardim, qui a réussi des exploits avec l’AS Monaco, a également circulé un temps, mais le profil du technicien portugais n’est sans doute pas assez sexy pour un club du standing de United.
Affaire à suivre donc, mais il ne faudra pas se louper une énième fois dans les choix du staff et dans le recrutement, à défaut de provoquer la foudre des supporters locaux lassés des saisons en demi-teinte et de l’absence de trophées majeurs.