Après une deuxième saison en demi-teinte, voire totalement ratée pour certains, la franchise True Detective fait son sur nos écrans cette semaine. Déjà cinq années se sont écoulées depuis la sortie de première saison, considérée comme iconique, portée par le fabuleux duo McConaughey-Harrelson. Beaucoup de doutes subsistaient quant à la survie de la série. Certains ne croyaient même pas à la production d’une nouvelle saison. HBO a longtemps hésité à renouveler le show, mais croit toujours en son joyau. Et après le visionnage des deux premiers épisodes de cette saison 3, l’heure est plutôt à l’excitation.
Un retour aux fondamentaux
L’alchimie insolente de la première saison entre le créateur (Nic Pizzolatto), le réalisateur (Cary Joji Fukunaga) et les acteurs principaux était la raison principale de la déroute connue par la suivante. Même si la réalisation restait de haute volée, l’intrigue devenait confuse au fil des épisodes et tombait parfois dans des excès inutiles. True Detective étant une série d’anthologie, les liens entre les saisons se font au niveau des thématiques et de la structure générale des épisodes. Il est donc essentiel d’avoir ça à l’esprit : l’essence même de la franchise est de créer un univers unique à chaque saison. Il n’y a pas de continuité entre elles. Les compteurs sont donc remis à zéro. Et s’il y a une chose perceptible dès les premières minutes de cette saison 3, c’est le retour aux fondamentaux des producteurs. Entre l’univers romanesque d’un film noir, l’attention portée à l’esthétisme et les paysages ruraux des monts Ozarks dans l’Arkansas, la volonté est de ramener le téléspectateur à ses premiers amours.
Avec une nouvelle équipe technique emmenée par Jeremy Saulnier (Green Room), réalisateur attitré, le défi est de taille. En effet, Fukunaga (Maniac, prochain réalisateur de James Bond) avait marqué d’une empreinte sublime les huit épisodes qui composent la première saison. Si on pose l’idée que celle-ci fait partie des meilleures de tous les temps – tous genres confondus – et qu’il est inutile de la comparer, le pari semble relevé. La photographie est parfaite, tandis que la bande-originale et le montage s’associent pour délivrer une enquête immersive, déjà propice aux questionnements et autres suppositions après seulement deux épisodes. On est déjà impatient de connaître la suite. Et ça, c’est déjà une réussite.
Une recette revisitée
Si un retour aux sources scénaristique était nécessaire quant à l’approbation de la majorité de l’audience, les personnages représentent un moyen de redynamiser la franchise. Et lorsqu’on fait appel à Mahershala Ali (Moonlight) pour jouer le rôle principal, on maximise ses chances de succès. En effet, l’acteur primé aux Oscars amène des nuances encore inconnues dans l’univers de True Detective. Pizzolatto décide cette fois de se concentrer non pas sur un duo de flics opposés dans leurs idées, mais sur un seul protagoniste, le détective Wayne Hays. Celui-ci possède des qualités similaires à celles de Rust Cohle – génie intuitif sur certains aspects – mais il ne porte pas d’intérêt poussé envers la philosophie, le pessimisme et la condition de l’Homme dans la société. Non, Hays est un vétéran du Vietnam Afro-Américain, travaillant dans un environnement dominé par les Blancs. Cela mène la série sur un terrain qu’elle n’avait jamais exploré auparavant et ouvre de nouvelles possibilités dramatiques.
Les émotions, la mémoire particulièrement, jouent un rôle crucial dans les deux premiers épisodes. Et Ali dépeint avec talent les traits caractériels de son personnage : réservé, parfois déconnecté, ses expressions de visages traduisant en un seul instant les maux dont il souffre. D’autant plus qu’il endosse son rôle dans trois temporalités différentes : en 1980, date du début de l’enquête, en 1990 lorsque des résultats relancent les recherches et enfin en 2015, où prend place une interview télévisée. Confronté à des problèmes de mémoire lorsqu’il est plus âgé, le montage joue habilement entre les époques et les états d’âme de Hays, garantissant ainsi un dynamisme immersif au fil des minutes, ce qui manquait cruellement à la deuxième saison.
En définitive, ce début de la saison 3 de True Detective balaye les doutes et affirme l’intention de redevenir cette série à la saveur si unique. Accompagné de la talentueuse Carmen Elizabeth Ejogo (Selma, It Comes At Night) et de l’expérimenté Stephen Dorff (Blade, Somewhere), Mahershala Ali semble avoir toute les cartes en main pour ramener la franchise vers l’excellence. Si le développement des personnages reste cohérent et que l’intrigue, déjà passionnante, tient toutes ses promesses, alors True Detective redeviendra avec assurance une série unanimement acclamée.