“J’étais fauché. Je n’avais littéralement pas d’argent sur mon compte. Mon frère m’a prêté 500 dollars. S’il ne l’avait pas fait j’aurais définitivement abandonné.“
Aujourd’hui signé dans l’un des meilleurs labels au monde, Reason est passé tout proche de mettre fin prématurément à sa carrière musicale. Sans une détermination immense, le rappeur de Los Angeles serait passé à coté d’une signature chez Top Dawg Entertainment, le label californien où sont réunis Kendrick Lamar, SZA, ScHoolboy Q, Jay Rock, Isaiah Rashad ou encore Ab-Soul.
Reason, de son vrai nom Robert Gill, avait placé le reste de ses économies, soit 100 dollars, dans un battle de rap qui aurait pu lui permettre de remporter 2 000 dollars. Lors d’une interview avec DJ Booth, il a expliqué : “Je connaissais les artistes et je savais que j’allais gagner. Je ne me pointais pas là-bas en pensant que j’allais perdre.” Et pourtant, le pire se produisit puisqu’une faute grave lors du concours lui coûta la victoire et ses dernières économies. Reason était alors totalement fauché et démotivé selon ses dires : “J’étais fauché. Je n’avais littéralement pas d’argent sur mon compte. Mon frère m’a prêté 500 dollars. Si il ne l’avait pas fait j’aurais définitivement abandonné.” Bien aidé par ce coup de pouce familial, Reason ne sait alors pas qu’il est tout proche de voir ses efforts récompensés. Et de la plus belle des manières.
Si cet artiste encore totalement inconnu du public en début d’année a pu signer dans un tel label, tout est parti d’un concert en petit comité en août 2017. Ce soir-là, Moosa Tiffith, le fils du patron de TDE, assiste à ce fameux show et il explique, toujours à DJ Booth : “Après l’avoir vu performer, je l’ai contacté simplement basé sur sa présence scénique. Sa capacité à contrôler une foule de 300-400 personnes même lorsque qu’elle n’est pas familière de sa musique m’a vraiment impressionné. Je suis devenu fan de lui cette nuit là.” C’est ainsi que Moosa Tiffith lui propose de devenir son manager, ce que Reason accepte fort logiquement. L’histoire est lancée.
Dès lors, par l’intermédiaire de son fils Moosa, Anthony “Top Dawg” Tiffith découvre le premier projet de Reason intitulé There You Have It et souhaite le rencontrer : “Mon manager Moosa m’a emmené à la maison de Top. Il voulait me rencontrer après avoir écouté ‘There You Have It’ et pour écouter de nouveaux morceaux. On lui a donc fait écouter des morceaux pendant 1h30 et pas une seule fois il a bougé la tête. Dès le troisième morceau j’avais le sentiment que c’était mort, que j’avais raté ma dernière chance. Il ne faisait que d’envoyer des textos tout du long. Je lui ai fait écouter de nouveaux morceaux sur lesquels j’étais très confiant, ainsi que d’anciens titres. Rien ne marchait.”
Et pourtant, les choses vont finalement se conclure de façon inespérée pour Reason, qui comprendra au passage toute la psychologie de la tête pensante du label californien : “Après 1h30 d’écoute, on a joué ‘Fuck With Me’ et il a bougé la tête pour la première fois. C’est le dernier morceau qu’on devait lui jouer. Top ne fait de cadeau à personne, même s’il vous apprécie. Il est toujours 3 ou 4 étapes en avance. Il souhaite vous faire deviner la suite et vous laisser dans le doute. C’est pour ça que TDE en est là. Je pensais qu’il détestait, alors que tout ce temps il pensait à me signer.”
La suite, les fans de Reason la connaisse déjà. Le rappeur a dévoilé une version remasterisée de son projet There You Have It sous l’égide de TDE le 28 septembre dernier, un album qui malgré avoir été conçu avec très peu de moyen, et des productions trouvées sur YouTube, s’avère particulièrement intéressant. On y découvre notamment les capacités d’écriture de Reason, à l’image de son story-telling qui est l’un de ses meilleurs atouts. Pas forcément californien dans les sonorités, There You Have It brille en tout cas via certains titres particulièrement marquants à l’image de “Fuck Wit Me”, “There You Have It”, “Drive Slow” ou encore “Better Dayz”. À coté de ça, Reason a aussi eu l’occasion de prendre la route pour assurer la première partie de la tournée “Redemption” de Jay Rock. De quoi s’offrir une opportunité immense d’apprendre du vétéran de son label et de glaner en expérience scénique.
Malgré les dizaines de bonnes raisons d’abandonner ses rêves dans l’industrie musicale, Reason a montré une persévérance impressionnante qui lui a permis de réaliser ce que bon nombre d’artistes rêvent : signer dans un label considéré comme le meilleur au monde. Si désormais, tout reste à prouver pour Reason, son histoire inspirante et son premier projet de très bonne facture laisse à penser une chose : il est destiné à briller.
There You Have It est à découvrir ci-dessous :