Dans quelques semaines débarquera en boutique le premier drop de la collection Automne/Hiver de l’iconique marque new yorkaise. Cependant, pour beaucoup, cette nouvelle collection apparaît être celle de la dernière chance.
Cela n’a échappé à personne, les collections printemps/été du streetwear et de la mode en général ont été marquée, surtout, par la collaboration inédite réalisée entre Louis Vuitton et Supreme. Aux yeux d’une grande partie des fans, cette collaboration à la médiatisation XXL est celle du fossoiement d’une part non négligeable de l’identité de la marque de skate. Quand en 2000 Supreme était poursuivi en justice par Louis Vuitton pour l’utilisation de son monogramme dans une série de box logos devenue légendaire dans le milieu du streetwear, on retrouve les mêmes marques, une quinzaine d’années plus tard, collaborer pour une capsule de luxe dont la gamme de prix très élevée se situait loin de celle, pourtant déjà onéreuse, pratiquée par Supreme.
Ce changement de politique pose forcément question à une heure où la marque de skate n’a jamais été aussi populaire — ni autant critiquée. Ainsi, même si l’ouverture à d’autres cultures et à une nouvelle direction artistique sur cette collection a été en partie saluée, il n’empêche que ce changement de ligne choisit par Supreme n’est pas du goût de tout le monde. En effet, si cette collaboration a autant fait parler d’elle, c’est notamment pour l’utilisation abusive du branding des deux marques, qui a conduit à nous offrir des pièces franchement ratées mais qui a surtout “volé” au streetwear l’utilisation du box logo de Supreme qui est, au même titre que le camo BAPE ou que le logo Stussy, l’un de ses éléments les plus identifiables et représentatifs du streetwear des années 2000 et 2010. Le changement de politique de Supreme est donc compréhensible à l’heure où la marque semble vouloir encore plus développer son impact sur la mode mais la perte d’une partie de l’identité de la griffe, même si celle-ci n’implique pas ses collections maisons, inquiète une partie de ses clients et pourrait lui jouer de sérieux tours si la qualité et la créativité des drops venait à en pâtir.
Une identité difficile à cerner et des collections maison décevantes
Car c’est bien là que le bât blesse : de saisons en saisons, les collections de la marque de skate semblent décliner et leur qualité en termes de créativité et d’originalité, tant louée par le passé, paraît ne plus autant être au rendez-vous. La raison à cela ? On peut tout d’abord citer de manière évidente le fait que de nombreuses marques de soient inspirées de Supreme pour en arriver parfois à produire des pièces plus efficaces que celles proposées par la marque new yorkaise. Alors que Sup’ avait pour habitude de tirer ses designs de la pop culture et de la skate culture, allant souvent jusqu’à les pomper de façon parfaitement assumée, la marque fait aujourd’hui partie intégrante de la pop culture et semble depuis se chercher, entre rétribution à la culture dont elle est issue et flou autour de ses inspirations.
Un syndrome illustre tout particulièrement le manque cruel de créativité dont Supreme fait preuve depuis quelques saisons (probablement autour de 2015) : les drops les plus attendus sont ceux lors desquels Supreme collabore avec d’autres marques, à l’image des classiques Supreme x The North Face. Aujourd’hui, même une collaboration avec une marque ou un artiste quasiment inconnu du consommateur lambda de Supreme recevra un meilleur accueil qu’un drop “Supreme only”.
Cela dit notamment de Supreme que la marque s’est laissée prendre en otage par la revente de ses produits — une collaboration avec une autre marque représente une plus value pour les revendeurs — mais aussi qu’en dehors de ses box logos et de quelques autres design, Supreme ne sait plus créer l’événement autour de ses collections de par leur originalité pauvre, d’une créativité en berne et d’un public de moins en moins initié qui achète sans réfléchir, simplement pour l’étiquette au rectangle rouge qui le fait entrer dans le cercle fermé de la hype et des “connaisseurs”. L’effet négatif de cela est la perte d’une partie de la clientèle plus ancienne, plus connaisseuse, bref, celle qui a participé au succès et au développement de la marque et que le manque de renouvellement oriente vers d’autres griffes et pousse loin des portes des boutiques Supreme les jeudis midis. Au final, ni connaisseurs ni nouveaux clients n’y trouvent leur compte.
La perte d’identité globale entraînée par la collaboration avec Louis Vuitton et les drops sans intérêts pourrait bien conduire la marque dans une impasse d’ici quelques années. S’il ne fait aucun doute que la marque n’a jamais été aussi populaire qu’aujourd’hui, l’absence de capitalisation sur ce qui a fait son succès associé à un modèle marketing audacieux risque à moyen terme d’orienter les clients et adeptes vers d’autres marques — ce qui serait peut être un électrochoc et forcerait Supreme à enfin se renouveler. Quoi qu’il en soit, cette nouvelle saison qui s’annonce et celle qui la suivra s’annoncent déjà décisives pour y voit plus clair dans la stratégie et la direction artistique de Supreme.