La mixtape 1994 du prodige belge Hamza nous dévoile un artiste nouveau, porté par une vague qu’il est le premier à développer dans le rap francophone. Et il paraît calibré pour s’exporter.
La carrière d’Hamza est déjà marquée par de nombreux projets, de H-24 à Zombie Life en passant par Santa Sauce. Ce nouvel opus marque, de l’aveu même du rappeur, une nouvelle étape dans son parcours, un nouveau départ. Une chose frappe dans la musique d’Hamza, c’est qu’elle ne ressemble à aucune autre sur la scène francophone. Il développe en effet une “vibe” qu’il est le seul à maîtriser aussi bien, qui n’est certes pas sans rappeler des sonorités que l’on peut retrouver outre-Atlantique, mais qu’il s’approprie et porte de façon à ce qu’il propose un projet unique de diversité, dans lequel il semble surfer de la première à la dernière seconde, s’ouvrant sans ambages sur ses faiblesses, chantant son amour définitif de la femme et son besoin d’en recevoir en retour.
Les inspirations du “H” sont vastes et nombreuses, et il a su comme peu d’autres les assimiler, les digérer et les intégrer à sa vision de la musique pour trouver des sonorités qui lui sont propres. Venu au rap par 50 Cent et au RnB par son père, c’est tout naturellement que le jeune prodige s’est distingué dès la sortie de son hit “La Sauce”, étalant déjà toute l’ampleur de son potentiel qu’il n’a fait que développer depuis, pour proposer aujourd’hui à son public la mixtape 1994. Ce talent a d’ailleurs déjà été repéré par l’une de ses filiations musicales les plus évidentes, à savoir celle qu’il entretient avec OVO. Ainsi, il est déjà apparu à deux reprises lors des OVO Sound Radio, la première fois pour le savoureux “El Dorado”, en collaboration avec le canadien Ramriddlz, et une autre fois pour son single “Vibes”. À la manière de ce que Drake a apporté avec lui dans le rap américain à la fin des années 2000, Hamza débarque dans 1994 à coeur ouvert, avec un sens de la mélodie et du rythme qui font de cette mixtape un véritable OVNI dans le paysage du rap français.
C’est un véritable exploit qu’a réussi Hamza avec ce projet : ce n’est pas un album mais bien une mixtape, et à ce titre elle peut prétendre être la meilleure de l’année dans le rap français, tant elle est cohérente malgré ce statut a priori moins abouti qu’un album. Le rappeur-producteur s’est très bien entouré pour la réalisation de son projet, notamment de son fidèle producteur Ponko, qui a composé pas moins de 10 des morceaux du projet. Accompagné de son ami Nico Bellagio, Hamza a récemment formé son propre label Just Woke Up, rattaché à Warner France, pour le compte duquel il a sorti aujourd’hui le premier projet. Le jeune belge a trop longtemps souffert d’un manque de visibilité ou de déficiences dans sa communication, et cette signature lui garantie d’ores et déjà un meilleur accompagnement, comme l’illustre l’attente suscitée par ce premier projet sorti chez Warner.
Avec ce projet, Hamza peut voir les choses en grand. Déjà relayé par des publications référentes dans la musique urbaine, comme The FADER, la musique du SauceGod ne semble pas être destinée à être consommée indéfiniment par des oreilles comprenant le français. Un bref regard à la scène rap francophone permet de rapidement réaliser que peu nombreux sont les artistes pouvant prétendre à embrasser une carrière internationale, quand Hamza paraît programmé pour toucher des publics différents à travers le monde. Pas besoin de comprendre ses paroles en effet pour saisir et profiter de la vibe que diffuse la musique du belge, entre les sonorités chatoyantes et dansantes, le rythme toujours calibré pour les appuyer, ou la justesse de la voix d’Hamza qui semble s’adapter à toutes les situations. Avec 1994, Hamza offre un projet épuré, pour lequel il avait enregistré une cinquantaine de tracks qui après le tri ont été réduits à 14 desquels aucun n’est à jeter, bien au contraire.
Si avec ce projet Hamza s’affirme comme un OVNI, c’est parce qu’il propose quelque chose que lui seul peut et sait faire. Et le mieux dans tout ça, c’est qu’une mixtape, aussi personnelle et travaillée soit elle, n’est qu’un échauffement avant de voir les choses en (très) grand dans un album déjà attendu de pieds ferme par une fanbase qui ne fera que grandir d’ici à sa sortie, surfant sur un succès que l’on peut déjà anticiper pour 1994. Aujourd’hui, Hamza est le seul artiste pouvant revendiquer cette identité musicale dans le rap francophone et cette différence est sa force tant elle lui laisse d’espace pour tenter de nouvelles choses et expérimenter des sonorités dans lesquelles beaucoup n’oseraient pas s’aventurer, à l’image du morceau “Juste une minute”.
Entre une filiation claire avec la branche la plus populaire du hip-hop et R&B mondial ces dernières années, un style propre et un potentiel pour s’exporter comme peu d’autres peuvent s’en vanter, Hamza est définitivement lancé et a pavé la voie d’un succès à large échelle, qui, s’il le vise, pourra s’étendre bien au-delà de nos frontières, au dessus même des barrières de la langue.