Il y a quatre ans jour pour jour, Kendrick Lamar offrait au monde l’un des plus grands albums de l’histoire de la musique afro-américaine.
Tout a probablement déjà été dit sur To Pimp a Butterfly. Album préféré de Barack Obama en 2015, vainqueur du Grammy Award du meilleur album rap, carton critique et commercial, le troisième long-format de Kung-Fu Kenny a mis tout le monde d’accord dès sa sortie mouvementée en mars 2015. Après avoir mis la barre très haut avec Good Kid, M.A.A.D City en 2012, Kendrick Lamar se savait attendu au tournant. Trois ans plus tard, le natif de Compton revient avec un projet incroyablement dense et complexe, qui fit rentrer son interprète dans une nouvelle dimension. Plus qu’un simple album rap, To Pimp a Butterfly peut s’apparenter à une odyssée musicale au coeur des piliers de la musique noire. K-Dot s’entoure d’une armée musiciens pour jongler entre les genres et les productions, du free jazz au funk en passant par le spoken word, faisant de son album un véritable laboratoire sonore à l’image de ce qu’avait pu être le 808’s and Heartbreak de Kanye West en son temps.
A la fois cohérentes et complètement anachroniques par instants, les sonorités de To Pimp a Butterfly ont été élaborées par ce qu’il se faisait de mieux dans la production West Coast de l’époque. Avec Dr. Dre et Anthony “Top Dawg”Tiffith à la production exécutive, Pharrell Williams, Terrace Martin, Sounwave ou les virtuoses électroniques du label Brainfeeder à l’image des géniaux Flying Lotus et Thundercat en charge de la production, le casting ayant participé à la confection de To Pimp a Butterfly peut s’apparenter à un blockbuster. Même s’il peut décontenancer lors de sa première écoute, le troisième album de Kendrick Lamar est un pari artistique qui prend toute sa force lorsque l’on prend le temps de se re-pencher dessus, encore et encore.
Plus que son extraordinaire richesse musicale, To Pimp a Butterfly peut également être considéré comme un grand roman moderne, profondément ancré dans l’époque de sa conception. À la fois introspectif et universel, Kendrick Lamar évoque tour à tour la condition afro-américaine, la vie à Compton, les doutes existentiels qu’il ressent face au succès, la foi religieuse ainsi que la dépression et les troubles mentaux. Le californien détaille chaque image, chaque vision, chaque pensée avec une précision digne des plus grands romanciers, conférant ainsi à To Pimp a Butterfly une portée bien plus large que la musique. Il suffit de se remémorer l’établissement naturel de “Alright” comme hymne du mouvement civique Black Lives Matter pour s’en rendre compte.
En plus de son extraordinaire profondeur musicale et lyrique, le projet de Kendrick Lamar s’apparente également à une véritable démonstration de force de la part du natif de Compton. K-Dot module sa voix, son flow, ses respirations et ses pauses avec un brio indéniable. Tour à tour engagé, enragé, calme, mélancolique, résigné ou plein d’espoir, le flow de Kendrick Lamar transmet un nombre incalculable d’émotions à l’auditeur de son projet. Sans jamais donner l’impression d’écouter un album fourre-tout. To Pimp a Butterfly lui permet à l’époque de s’affirmer définitivement comme l’un, si ce n’est le plus grand rappeur de son époque. Considéré à bien des égards comme un disque majeur du XXIème siècle, l’album sur la transformation de la chenille en papillon est un sublime hommage à l’extraordinaire richesse de la culture afro-américaine et aux racines de son créateur. Pour son ancrage social, son inventivité musicale et toutes les émotions qu’il transmet, To Pimp a Butterfly peut légitimement être considéré comme le projet le plus cohérent de la carrière de Kendrick Lamar.
En ce quatrième anniversaire, To Pimp a Butterfly est à réécouter ci-dessous.
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