Le timing était parfait. Le retour de la pluie et de la fraîcheur automnale a coïncidé avec un autre come-back, bien plus réjouissant. Ce dimanche, Frank Ocean est en effet sorti de son silence pour dévoiler un nouveau single, le planant “DHL.” Extrêmement discret depuis quasiment deux ans, le chanteur américain a donc réservé une belle surprise à ses fans. Une offrande qui peut en laisser présager d’autres pour les prochains mois. Excepté quelques morceaux comme “Biking”, “Lens”, “Provider”, “Chanel”, plusieurs featurings, notamment sur le magnifique “Purity” d’A$AP Rocky et la sortie d’une cover de “Moon River”, le mystérieux chanteur a su prendre son temps depuis la sortie de Blonde. C’est dans un nouvel épisode de Blonded Radio (dans lequel il a diffusé un morceau de Magic System) que Frank Ocean a présenté son nouveau titre. R&B expérimental, séquence en voix pitchée, référence à sa sexualité, son amour des voitures, son rapport à la drogue… Ce morceau reprend de nombreux codes qui ont largement fait la substance et la singularité de la musique de Frank Ocean depuis ses débuts. Pour le plus grand plaisir d’une fanbase avide de découvrir les nouvelles créations du crooner.
Ce nouveau titre pourrait d’ailleurs sans doute figurer sur la tracklist de son prochain album. C’est l’artwork du morceau qui vient en effet nous mettre la puce à l’oreille. On remarque en effet en bas à droite de la cover, la présence de 13 symboles représentant le corps de Frank, alors que celui qui est mis en avant par un fond noir correspond à la position de l’artiste sur la cover. En clair, “DHL” pourrait bien être le 4ème morceau d’un album de 13 titres du chanteur américain. Bien que, comme vous vous en doutez, cela relève pour l’instant de la théorie. Et on sait que Frank Ocean aime laisser ses fans théoriser.
Outre “DHL”, Frank Ocean a également annoncé la sortie de deux titres intitulés “Cayendo” et “Dear April”, qui ne sont pour l’instant disponibles qu’en version vinyls. Ces nouveaux morceaux s’accompagnent par ailleurs de remix produits par le DJ américain Sango et l’incontournable duo français Justice. Un choix artistique intéressant, qui vient appuyer les propos de Frank Ocean dans une interview accordée à W Magazine il y a quelques semaines : “Je m’intéresse aux clubs, et aux différentes itérations de la vie nocturne dans la musique et les morceaux. Et donc les choses que je regarde à l’heure actuelle appartiennent à ces scènes : Detroit, Chicago, la techno, la house, l’électro française et la bounce music de la Nouvelle-Orléans.” Les versions alternatives de “Cayendo” et “Dear April” vont donc dans le sens d’un nouveau projet tourné vers la musique électronique et plus globalement, vers le monde de la nuit.
Ce monde, Frank Ocean vient de s’y immiscer en annonçant l’ouverture de sa boîte de nuit à New York ce week-end, le PrEP+. Un nom original, qui rend hommage à un médicament dispensé dans le cadre de la prévention contre le VIH. Entrée uniquement sur invitation, lieu tenu secret jusqu’à la dernière minute, Justice programmé pour l’inauguration… Le club créé par le natif de La Nouvelle-Orléans se veut être “un hommage à ce qu’auraient dû être les clubs de New York dans les années 80 si [le PrEP+] avait existé.” Ultra exclusif et conçu pour être un lieu accueillant pour la communauté LGBT, le PrEP+ possède des règles claires, comme l’a expliqué le chanteur à Pitchfork via un communiqué de presse : “Les photos et les vidéos ne sont pas autorisées. Le consentement est obligatoire. Zéro tolérance pour le racisme, l’homophobie, le sexisme, la transphobie, le validisme ou aucune autre forme de discrimination. Le dancefloor sert uniquement à danser.”
En l’espace d’un week-end, Frank Ocean a donc dévoilé trois nouveaux morceaux, enregistré un épisode de Blonded Radio, ouvert une boîte de nuit à Manhattan et commercialisé une nouvelle capsule de merch. Difficile d’être plus efficace pour occuper l’espace médiatique. Et à la vue de l’engouement et des réactions suscitées par ce retour en fanfare, force est de constater que le chanteur n’a rien perdu de son aura. Compositeur et interprète de génie, Frank Ocean prouve ici qu’il fait partie du cercle (très) fermé des artistes pouvant se payer le luxe de se tapir dans l’ombre durant de longs mois, sans craindre de perdre des fans en route. Dans une époque où la tendance est à l’enchaînement de projets, de collaborations, à la proximité toujours plus grande avec ses fans, Frank Ocean est une anomalie, un artiste unique en son genre.
Plus que jamais, la question du troisième album revient sur le tapis. Influencé par la musique électronique française et nord-américaine, travaillé avec un instrumentiste spécialisé dans les cordes à Rio de Janeiro, le prochain projet de Frank Ocean ne devrait plus trop se faire attendre. Une parution avant la fin d’année n’est donc plus à exclure, ce qui constituerait une excellente nouvelle au coeur d’une année bien terne en termes de sorties américaines majeures. À moins que Frank Ocean nous prenne une nouvelle fois à contre-pied. Après tout, c’est ce qui fait son charme.
À lire aussi : Pourquoi Or Noir de Kaaris est l’un des albums les plus importants de la décennie