Si Krisy débute la plupart de ses morceaux par l’énonciation de son nom suivi d’un “a.k.a De La Fuentes, a.k.a le jeune Julio, a.k.a le mouvement du sel sur ton steak,” c’est tout sauf un hasard ou une boutade. Le mouvement du sel ? C’est tout simplement un fait : Krisy est là pour assaisonner vos oreilles d’une musique raffinée dont il a le secret. Et il est, à coup sûr, la meilleure saveur que vous pourrez goûter ces prochains mois.
Vous ne le savez peut être pas, mais vous avez forcément déjà entendu Krisy dans ses oeuvres. Pur autodidacte qui a appris la production et le métier d’ingénieur du son par lui-même, à “l’Université Libre de YouTube” comme il aime l’expliquer, l’artiste belge a en effet déjà participé à de gigantesques hits qui ont donné une grande visibilité à son alter-ego producteur De La Fuentes.
Ce nom ne vous dit rien ? C’est pourtant celui qui est notamment susurré par une voix féminine au début du morceau “Paris c’est loin” de Booba et Damso, sorti en 2016, ou encore lui qui a produit et surtout assuré le job d’ingénieur du son pour l’album Batterie faible de Dems. Au départ grand fan de rock, Krisy en est venu au rap en découvrant l’album Chronic 2001 de Dr Dre, et se met à la musique en 2010. Paufinant son art, il a sorti pas moins de quatre EPs entre 2010 et 2014: Weedtape, Blacksouag, Jouvance et Parmi vous. Après ces premières expérimentations, le jeune Krisy choisi de se focaliser sur l’ingénierie du son et le beatmaking, avec le succès qu’on lui connaît.
Après la réussite de “Paris c’est loin”, Krisy reprend sa casquette d’interprète pour proposer l’EP Menthe à l’eau en juillet 2016, un projet produit et enregistré en 4 jours seulement, puis pour Paradis d’Amour, sorti le 14 février 2017. Cette date ne tient pas du hasard et, qu’on se le dise, Krisy est un lover inspiré presque exclusivement par l’amour, comme beaucoup d’artistes masculins, et cette approche musicale est plus affirmée depuis ces deux projets qui nous offrent un univers affirmé, une réelle mise en scène de Krisy, à la manière d’un film. Un film ? Oui, car l’un des rêves du belge est d’en réaliser un, et plus précisément une comédie musicale. Il a déjà pu tenter l’expérience avec son EP Menthe à l’eau, un projet qu’il faut écouter du début à la fin pour en saisir toute l’essence et comprendre le lien qui unit toutes les pistes. Le mode shuffle est ici à bannir, donc.
Si l’idée de voir un jour Krisy diriger un film ne surprend pas, c’est à la fois car il a déjà endossé plusieurs casquettes dans sa jeune carrière mais également car le propre de ses créations est de raconter une histoire et de mettre en scène sa musique. La mise en scène est au coeur de son travail et on avait déjà pu l’observer cet été distiller des indices à la manière d’un thriller pour permettre à son public de découvrir un EP caché. À la façon d’un réalisateur, Krisy prend en compte tous les aspects du scénario de sa carrière, ne laissant rien au hasard, que ce soit sur ses réseaux sociaux, dans l’univers qu’il construit autour de son personnage ou encore son entourage, comme l’illustre sa récente signature chez Pascal Nègre, ancien PDG d’Universal Music France, qui a récemment lancé #NP, vouée au management de carrières d’artistes. C’est cette même logique qui l’a vu lancer Le Jeune Club, sa propre structure dédiée à réaliser, repérer, produire et manager de jeunes artistes.
Dans sa musique non plus, rien n’est laissé au hasard. Ainsi, c’est d’abord par le storytelling que Krisy se démarque, lui qui est inspiré par MC Solaar, Doc Gyneco, Les Sages Po’ ou encore l’album Jeu de société de Disiz, avec une influence des années 90 qui coule dans l’encre de sa plume. Dans son écriture, il se positionne comme un diplomate pour parler de ce qui l’entoure, tout en réussissant grâce au choix toujours savant de ses mots plonger l’auditeur au coeur de l’histoire qu’il raconte. Jamais grossier et jamais avare du bon mot, cela se ressent particulièrement dans son EP Paradis d’Amour, où il introduit le “Jeune Julio et sa gogo danseuse”, en référence à Julio Iglesias et son titre Manuela, qui lui a valu un passage très remarqué chez Colors.
Avec son flow calme mais manié à merveille pour coller aux productions, il sait parfaitement faire le lien entre le storytelling et la musicalité pour offrir des morceaux raffinés qui, malgré des inspirations nineties, ont un caractère chill assumé qui laissent souvent la place à des séquences rythmées et groovies dans l’air du temps. C’est à ce point que le jeune Julio et De La Fuentes se rencontrent pour offrir Krisy aux auditeurs. Chaque nouveau titre distillé par l’artiste en est une preuve de plus, que ce soit son dernier, “Belle”, disponible gratuitement sur SoundCloud ou son prochain qui devrait bientôt sortir et qu’il a dévoilé en avant-première sur Skyrock, “Nice”. Alors qu’il aurait pu être étiqueté comme rappeur, comme producteur ou comme ingénieur du son, Krisy a choisi de se refuser à chacun de ces titres pour être un artiste complet qui jongle avec ses différentes compétences pour proposer à chaque fois un savant mélange artistique qui fait de lui un véritable OVNI sur la scène musicale francophone.
Le premier album du jeune Julio, intitulé “Euphoria”, devrait arriver bientôt et il sera accompagné d’une bande dessinée, comme une illustration de plus du fait qu’il souhaite être compris et considéré comme un véritable artiste-interprète. Une chose est sûre, vous n’avez pas fini de voir Krisy déposer le sel sur votre steak dans un mouvement onctueux. Si tout lui reste à prouver sur une scène très concurrentielle, son potentiel ne laisse aucune place au doute et vous pouvez commencer par vous régaler des titres et productions qu’il a déjà ajouté à son menu.