Au coeur de la révolution des pivots NBA

Les années passent et la NBA continue d’évoluer d’année en année. Si dans les années 90 les pivots dominants étaient nombreux avec un jeu à l’intérieur prôné et peu de tirs extérieurs. Le jeu a aujourd’hui bien changé. Et qu’est-ce que cela implique pour les pivots ?

Les années 90 semblent désormais bien loin. Ce n’est pas par hasard que nous retrouvons très souvent des anciens joueurs revenir sur le jeu actuel et ainsi critiquer ouvertement des équipes telles que les Warriors ou les Rockets. Le jeu est désormais axé sur la ligne extérieure. Ajoutez énormément de spacing à cela, Houston étant certainement le parfait exemple sous la tutelle de Mike D’Antoni.

Les années 90 : L’époque des pivots ultras dominants

Mais si la NBA en est là aujourd’hui, aussi médiatisé et connue notamment en Europe, c’est aussi grâce à des pivots. Wilt Chamberlain et ses 100 points ou encore Bill Russell et sa domination. Des pivots qui possédaient un physique hors-norme. En profitant logiquement pour maltraiter les défenses adverses dos au panier. Plus tard, des joueurs ont continué cette lignée, Shaquille O’Neal, Hakeem Olajuwon ou encore David Robinson ont continué à marquer ce poste dans la plus pure lignée de leurs ainés.

Les pivots prenaient une place importante, notamment dans les classements de scoring. Quant à l’époque nous pouvions trouver presque 10 joueurs dans le top 20 des meilleurs marqueurs NBA. À titre de comparaison, en 2013, nous n’en trouvions que 2, Demarcus Cousins et Al Jefferson.

Bien loin l’époque des Ewing, Mourning, Mutombo ou encore Olajuwon. Une ambiance sur le parquet bien différente. La culture du jeu de l’époque impliquait que la balle allait sans cesse dans la raquette. D’autant plus pour les équipes dotées d’un pivot avec de bonnes qualités offensives et généralement un shoot dans le périmètre. L’évolution du poste de pivot peut se comprendre avec des équipes qui ont changés la vision globale du poste. Pour comprendre cette métamorphose, il faut revenir aux Suns de Steve Nash.

“Run and Gun” ou encore “7 seconds or less” 

Voilà ce qui dans les années 2000 va mener le poste de pivot à une lente agonie mené par Mike D’Antoni, oui, encore lui. Finit les ballons dans la raquette et le jeu au poste. Cela ralenti le jeu et la circulation de la balle. Et bonjour les 3 points, le jeu rapide en contre-attaque. Car oui, le coach Mike vous le dira, 3 points c’est mieux que 2 points. Exit les scoreurs majeurs en poste 5, les équipes cherchent donc elles aussi à avoir de bons shooteurs et à jouer small ball.

Et difficile de donner tord à cette tactique. Les Suns vont survoler la saison, Mike D’Antoni finira coach de l’année. Pour son retour Steve Nash sera quant à lui MVP et meilleur passeur de la ligue. Une stratégie risquée et compliquée mais qui portera rapidement ses fruits. Cette saison là, personne n’attendait les Suns et irrémédiablement, les pivots en subissent les conséquences.

Une période plus compliquée 

Pendant longtemps, Dwight Howard a été considéré comme la référence à son poste, son transfert aux Lakers est plébiscité, la suite ? Beaucoup moins jolie. Star à Orlando, le joueur a connu un vide total aux Lakers, preuve ou non que les pivots galèrent dans des équipes qui veulent viser le haut du panier. Le joueur est désormais bien loin de son niveau d’Orlando et peine à trouver sa place durablement dans une équipe.

Désormais, les équipes préfèrent donc miser sur un extérieur. Estimant déjà la grande influence potentielle dans le jeu, ainsi que quelqu’un capable de mieux shooter. Il faut dire qu’aujourd’hui, si une équipe veut aller chercher ou au moins prétendre à un titre, elle se doit de posséder un backcourt de qualité. Les Warriors, les Cavs ou même les Spurs ne s’appuyant pas sur un poste 5 dominant offensivement. Avec Bogut, Thompson et Splitter respectivement à leurs années championnes, elles reposaient toutes sur le tir à 3 points et le mouvement de balle plutôt que sur la domination intérieure.

Un rôle qui change encore 

Nous pourrions revenir sur Deandre Jordan, Drummond, ou encore Howard associés souvent à des pivots faisant leur loi dans la raquette et qui montre l’évolution du poste. Mais souvent aussi à un manque de palette offensive, et une piètre qualité au lancer-franc. La saison dernière Jordan finissait dans la All-NBA First team, un choc pour beaucoup qui imaginaient Cousins à cette place. Pourtant, DeAndre Jordan représente le pivot “parfait” de cette génération. Capable de suivre le rythme, de mettre quelques paniers en attaque grâce notamment à sa qualité au rebond offensif. Intimidant dans la raquette, et intéressant au contre. Et cela s’est vu encore durant les J.O à Rio. Quand Cousins avait du mal à trouver sa place dans cette “Dream Team” remplie de shooteur, DeAndre semblait lui beaucoup plus à l’aise et l’équipe encore plus forte. Un pivot qui se met de côté offensivement, mais qui remplit son rôle défensivement. Un pivot besogneux, à l’image de la majorité d’entre eux aujourd’hui.

Manquant d’un big men, beaucoup d’équipes ont décidé de par le jeu actuel, de décaler très souvent le poste 4 au poste 5. Chris Bosh s’est vu devenir pivot pour les besoins de du Heat par le passé. Ou encore un exemple bien plus récent les Spurs, l’année dernière Tim Duncan était décaler au poste 5, avec un vrai jeu dos au panier. Après sa retraite, c’est aujourd’hui Pau Gasol qui remplit cette fonction, lui poste 4 d’origine.

Et ce n’est pas la seule évolution du poste, loin s’en faut.

Les pivots shooteurs 

Difficile de croire qu’aujourd’hui un bon nombre de pivots prennent des tirs à 3 points, et pas qu’un peu. Impensable à l’époque pour des joueurs qui n’existaient que dans la raquette. Et pourtant dans une ligue qui se réinvente sans cesse, voir un pivot posséder cette qualité peut s’avérer être un atout majeur et nécessaire.

Le 3 décembre 2016, les Boston Celtics reçoivent les Sacramento Kings. Al Horford rencontre donc Demarcus Cousins. Les deux joueurs finiront meilleurs marqueurs de leur équipe respective à 3 points, dont un joli 4/7 pour Horford. En 2015 Cousins a tenté 8 tirs primés dans la saison. Cette année, il en a déjà tenté 147. Une vraie prouesse quand on sait qu’il est à 39 % dans cet exercice. L’exemple parfait est sa fin de match contre les Sixers, clutch, et qui plus est à 3 points. Un symbole de cette génération de pivot adroit derrière la ligne extérieure.

https://www.youtube.com/watch?v=_Yurmi2IEMo

Et c’est un phénomène qui s’accentue, Cousins est loin d’être le seul cas. Horford, Embiid, Marc Gasol ou Towns tentent au moins 3 tirs par matchs. Brook Lopez en tente déjà plus de 5 par matchs ! Ceux-là sont les plus efficaces, mais ils existent une bonne dizaine de pivots tentant au moins 2 tirs primés par matchs. Du jamais-vu, sans même mentionnés les postes 4 comme Porzingis entre autres qui en font une vraie arme. Mais c’est surtout un profil plus mobile qui intéressent désormais. Moins de lenteur, plus de mouvement pour mettre un jeu rapide, et plus fluide.

Et même si le pivot ne tente pas son tir extérieur, il reste une menace à prendre au sérieux, ce qui ouvre des opportunités à ses coéquipiers.

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Mon tir ouvre beaucoup de voies pour Mike Conley, pour les arrières. Pas juste pour les pénétrations, mais pour les coupes et les choses comme ça. Tant que mes coéquipiers aiment ça, je suis prêt.

[divider]Marc Gasol[/divider]

Une belle génération à venir ?

Mais que les puristes se rassurent, le poste 5 semble avoir encore de beaux jours devant lui et une belle génération est en train de s’imposer. Karl-Anthony Towns démontre de fantastiques qualités, et s’annonce d’ores et déjà comme un joli rayon de soleil dans la raquette (et pas seulement) pour les années à venir. Jahlil Okafor pourrait lui aussi devenir intéressant offensivement. En perte de temps de jeu avec le retour d’Embiid, il faudra attendre un peu avant de voir son réel potentiel. Nous pourrions aussi parler du pivot Myles Turner chez les Pacers et pour notre côté patriote, le français Rudy Gobert qui s’amuse dans l’Utah.

Et enfin, ce duo qui pourrait enchanter nos futures années NBA, Joel Embiid et Demarcus Cousins, le dernier martyrisant la ligue depuis maintenant plusieurs années. Le premier démontre de superbes qualités, de jolis moves, le nouveau “Olajuwon” pour certains a déjà secoué beaucoup de mondes.

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J’aime beaucoup ce gamin. Je ne suis pas du genre à lancer facilement des compliments, mais je pense qu’il a une grande chance de devenir le meilleur big de la ligue… après ma retraite.

[divider]DeMarcus Cousins[/divider]

Des petites tapes sur les fesses, des louanges à perte de vue. Le paysage de la NBA a certainement vu naitre un joli duel pour les prochaines années. Cousins est un exemple du pivot idéal, fort, athlétique et polyvalent désormais même à 3 points. Le joueur est la référence, un exemple à suivre donc (en évitant les sauts d’humeur).

Mais une question demeure, un pivot dominant peut-il encore briller dans une équipe visant le titre ? Pourrait-on voir Cousins lutter pour le titre lui qui n’a jamais encore disputé un seul match de playoffs ? Aujourd’hui encore aucun pivot dominant ne joue dans une équipe pour le titre. Mais cela pourrait bien changer dans les années à venir.