Serena Williams est la véritable muse de Virgil Abloh

Souviens-toi Roland dernier. Il y a un an, Serena Williams provoquait une controverse de taille avec la tenue qu’elle avait décidé d’arborer du côté de la porte d’Auteuil. Il n’était ici nullement question de ses performances tennistiques, d’un éventuel dérapage envers le corps arbitral, mais bien de l’accoutrement de la championne américaine. Une combinaison noire et ultra-technique, inspirée par le blockbuster Black Panther, à mille lieux des standards aseptisés du style féminin sur les courts. Ce virage à 180 degrés, loin des habitudes en vogue sur les courts, n’avait à l’époque pas plu du tout au président de la FFT Bernard Giudicelli : “Je crois qu’on est parfois allé trop loin. Cette tenue ne sera plus acceptée. Il faut respecter le jeu et l’endroit.” La polémique était lancée, opposant les admirateurs de l’avant-gardisme de cette tenue aux conservateurs de la vieille école.

Quelques mois plus tard, en plein milieu du mois d’août, la star du tennis arrive à l’US Open en grande favorite. “En Serena, nous avons une muse qui est l’une des athlètes les plus puissantes et les plus exaltantes de notre génération. J’ai essayé d’incarner son esprit et j’ai voulu apporter quelque chose d’engageant et de frais au tennis.” C’est par ces mots que Virgil Abloh dévoile alors la collection qu’il a créé, en collaboration avec Nike, pour habiller Serena Williams lors de cette 135ème édition du tournoi new-yorkais. La tête de gondole du streetwear mondiale s’alliant avec la plus grande joueuse de tous les temps, sous l’effigie de l’équipementier le plus célèbre du globe, l’association avait de quoi faire rêver. Une robe tutu ultra féminine, inspirée par la danse classique, et plusieurs paires de sneakers Nike x Off-White plus tard, Serena Williams atteindra la finale du grand chelem new-yorkais.

Ce lundi 27 mai, la star américaine faisait son retour sur les courts de Roland-Garros, en écartant assez facilement la russe Vitalia Diatchenko. Néanmoins, et comme souvent, son choix de tenue était l’un des sujets de discussion préféré du public parisien et des journalistes présents sur place. La native du Michigan s’est en effet présentée sur le Philippe-Chatrier dans une tenue noire et blanche, en forme de cape. Cette pièce insolite était une fois de plus designée par Virgil Abloh, qui est vraisemblablement inspiré par les performances et la personnalité de Serena. Peu conventionnelle dans son design, cette tenue l’est également de par le message qu’elle porte. Les mots “Déesse,” “Mère”, “Championne” ou encore “Reine” (en français dans le texte) sont touts inscrits sur cette pièce, une référence directe aux déclarations de la joueuse lorsqu’on l’avait interrogé sur sa combinaison de l’an dernier. “Je me sens comme une princesse guerrière. Comme une reine du Wakanda” avait-elle déclaré à l’époque.

L’histoire d’amour continue donc entre Virgil et Serena. Cette dernière s’est en tout cas montrée très enthousiaste à l’idée de collaborer une nouvelle fois avec le créateur : “Je suis super excitée car c’est le meilleur designer du moment et car c’est quelqu’un d’extraordinaire. Il y a ces mots en français. Ça parle de moi en tant que mère et de moi en tant que reine, comme toutes les femmes le sont. Une championne. C’est du renforcement positif et je dois avouer que j’aime ça.” De son côté, le public a répondu présent, un t-shirt et une casquette Nike créée par Abloh pour cette collection s’étant retrouvés sold-out en quelques secondes dans la journée d’hier. Un t-shirt full-black, sur lequel on pouvait lire : “Je ne m’arrêterai jamais“, encore une fois écrit en français. Cette collection peut, et doit, dont être interprétée comme une attaque frontale (réussie) contre la FFT et les recteurs du bon goût. Une fois de plus, la joueuse et le designer délivrent un message fort au monde entier.

Habituée de ce genre de controverse, Serena Williams a toujours su allier son extraordinaire puissance raquette en main à des tenues sortant elles aussi de l’ordinaire. Dès l’US Open 2004, la joueuse américaine revêt par exemple une mini-jupe en jean, alors pleinement en vogue dans la mode de la rue de l’époque, mais bien éloigné des courts de tennis, à l’exception d’André Agassi dans les années 90 et de ses mythiques shorts en jean. Véritable influenceuse dans le monde du sport féminin, Serena Williams est sans aucun doute sportive la plus célèbre au monde. Elle est en tout cas la mieux payée, avec 18 millions de dollars de gain en 2018 selon Forbes. Il est également intéressant de noter que “Queen Serena” évolue dans le seule sport où la médiatisation homme/femme est à peu près équivalente. Le sport féminin le plus suivi au monde est le tennis, et de très loin. Le classement Forbes des sportives les mieux payées au monde le prouve, avec 8 tenniswomen dans le top 10.

En s’associant pour la seconde fois à Serena Williams, 23 titres du Grand Chelem au compteur, Virgil Abloh prouvent qu’il a trouvé l’égérie féminine parfaite, sa muse rêvée. Même si le constat peut paraître triste en 2019, Serena Williams est probablement la seule sportive pouvant rivaliser en terme de renommée avec les plus grands athlètes masculins. Outre son niveau tennistique ahurissant, qui lui permet d’écraser n’importe quelle adversaire lorsqu’elle est en pleine possession de ses moyens, Serena Williams est une figure de proue de la “Black Excellence.” Dans un sport historiquement pratiqué par les blancs issus des classes supérieures, Serena Williams a rapidement été couronnée reine de sa discipline. Son engagement social et son parcours de vie chaotique font de la native du Michigan une parfaite porteuse de message pour Virgil Abloh, qui a toujours prôné l’ouverture, l’échange et la découverte de l’autre dans son travail. Et alors qu’elle défiera la japonaise Kurumi Nara demain pour décrocher son billet pour le troisième tour de Roland-Garros, Serena Williams n’aura probablement qu’une seule phrase en tête : “Je ne m’arrêterai jamais.” C’est aussi à ça que l’on reconnaît une championne.