CAN 2022, chronique d’un bashing médiatique

CAN 2022, chronique

d’un bashing médiatique

CAN 2022, chronique d’un bashing médiatique

Dimanche soir, le Sénégal a été sacré champion d’Afrique. Les Lions de la Teranga ont décroché leur premier sacre au bout de quatre semaines de compétition intenses, pavées de scandales et de polémiques qui ont éclipsé le jeu. 

85 minutes de jeu se sont écoulées dans ce premier match de poule qui oppose le Mali à la Tunisie. Les Aigles de Carthage, menés 1-0, ont un peu plus de cinq minutes pour arracher le nul ou mieux, la victoire. D’un coup de sifflet, l’arbitre Janny Sikazwe met fin à la partie. Le banc tunisien s’agite et s’indigne devant cet arrêt prématuré. Pour masquer sa méprise, l’homme en rouge simule une pause fraîcheur. La chaleur est étouffante, le thermomètre affiche plus de 30 °C. Les sportifs s’hydratent, reprennent le jeu, puis, à quelques secondes de la fin du temps réglementaire, le scénario se répète, dans l’incompréhension générale. Le match s’achève subitement, dérobé de ses quelques minutes de temps additionnels et les Maliens remportent leur premier face à face de la Coupe d’Afrique des nations (CAN). Rapidement, les images de cette fin de match burlesque font le tour du monde. Sur Twitter, Janny Sikazwe est moqué, couvert d’opprobre, bientôt transformé en mème.

Il a sifflé la fin du match a la 89.50 alors qu’il y a eu 9 changements, 2 penaltys (dont une avec var), des arrêts de jeu et un carton rouge

Il est officiellement bourré !#TUNMLI pic.twitter.com/WKLWUide5l

— Sofihane ⭐⭐ (@L_interiste_) January 12, 2022

Personne :

L’arbitre de Tunisie – Mali : pic.twitter.com/CTaQsvPBxC

— Winamax Sport (@WinamaxSport) January 13, 2022

Mais c’est que la 89e minute… Euh… Oui le match est terminé je confirme. pic.twitter.com/ULYiSBKfaD

— Winamax Sport (@WinamaxSport) January 12, 2022

L’arbitre a mis 500.000 franc CFA sur la victoire du Mali me faites pas jurer

— jprínce (@jprinceQ) January 12, 2022

Cet arbitrage désastreux est la seconde bévue qu’enregistre la 33ᵉ édition de la CAN, après l’absence de l’hymne mauritanien au début de l’autre match du groupe F. Plusieurs autres suivront : la mauvaise gestion globale de la Covid-19, la grève des joueurs gabonais ou, plus grave encore, la bousculade mortelle aux abords du stade d’Olembé. Les couacs se sont multipliés tout au long de la compétition, faisant les choux gras de plusieurs émissions de débriefing qui ont contribué à vitaliser les stéréotypes et les clichés pesant sur le football africain et, plus largement, sur tout un peuple. 

Dimanche soir, le Sénégal a été sacré champion d’Afrique. Les Lions de la Teranga ont décroché leur premier sacre au bout de quatre semaines de compétition intenses, pavées de scandales et de polémiques qui ont éclipsé le jeu. 

85 minutes de jeu se sont écoulées dans ce premier match de poule qui oppose le Mali à la Tunisie. Les Aigles de Carthage, menés 1-0, ont un peu plus de cinq minutes pour arracher le nul ou mieux, la victoire. D’un coup de sifflet, l’arbitre Janny Sikazwe met fin à la partie. Le banc tunisien s’agite et s’indigne devant cet arrêt prématuré. Pour masquer sa méprise, l’homme en rouge simule une pause fraîcheur. La chaleur est étouffante, le thermomètre affiche plus de 30 °C. Les sportifs s’hydratent, reprennent le jeu puis, à quelques secondes de la fin du temps réglementaire, le scénario se répète, dans l’incompréhension générale. Le match s’achève subitement, dérobé de ses quelques minutes de temps additionnels et les Maliens remportent leur premier face à face de la Coupe d’Afrique des nations (CAN). Rapidement, les images de cette fin de match burlesque font le tour du monde. Sur Twitter, Janny Sikazwe est moqué, couvert d’opprobre, bientôt transformé en mème.

Il a sifflé la fin du match a la 89.50 alors qu’il y a eu 9 changements, 2 penaltys (dont une avec var), des arrêts de jeu et un carton rouge

Il est officiellement bourré !#TUNMLI pic.twitter.com/WKLWUide5l

— Sofihane ⭐⭐ (@L_interiste_) January 12, 2022

Personne :

L’arbitre de Tunisie – Mali : pic.twitter.com/CTaQsvPBxC

— Winamax Sport (@WinamaxSport) January 13, 2022

L’arbitre a mis 500.000 franc CFA sur la victoire du Mali me faites pas jurer

— jprínce (@jprinceQ) January 12, 2022

Cet arbitrage désastreux est la seconde bévue qu’enregistre la 33ᵉ édition de la CAN, après l’absence de l’hymne mauritanien au début de l’autre match du groupe F. Plusieurs autres suivront : la mauvaise gestion globale de la Covid-19, la grève des joueurs gabonais ou, plus grave encore, la bousculade mortelle aux abords du stade d’Olembé. Les couacs se sont multipliés tout au long de la compétition, faisant les choux gras de plusieurs émissions de débriefing qui ont contribué à vitaliser les stéréotypes et les clichés pesant sur le football africain et, plus largement, sur tout un peuple. 

Éternel vilain

petit canard

Éternel vilan petit canard

« L’erreur est humaine, sauf en Afrique, où elle appartient à tous les Africains », posait l’écrivain franco-algérien Mabrouck Rachedi en janvier dernier dans une chronique signée pour Le Monde. Le postulat pointe un amalgame trop souvent observé dans l’indifférence. Une sorte de vérité muette que l’on approuve sans dénoncer. L’Europe et son foot traînent pourtant bien leur lot d’effets indésirables, sur les pelouses ou hors des rectangles verts. En décembre dernier, l’imbroglio des tirages pour les huitièmes de finale de la Ligue des champions entache l’image de la plus haute institution du football européen. Mais quelques heures seulement suffisent à gommer l’erreur des boules. Un « problème technique », selon les mots de l’UEFA, éclipsé par l’annonce d’un choc entre le Real Madrid et le Paris Saint-Germain. « Les gaffes commises dans ces contrées relèvent d’individus. Ce sont des actes isolés, poursuit Mabrouck Rachedi. Ils ne sont pas révélateurs d’une mentalité, d’une culture. Ils peuvent certes être moqués, mais ils ne sont pas ramassés en un tout réducteur. » Jamais rattachés à un continent.
La condescendance notable envers les compétitions africaines s’inscrit dans un contexte d’ethnocentrisme, et n’est en rien propre à l’Afrique. « Cette déconsidération ne s’observe pas que pour la CAN, soutient Elton Mokolo, journaliste à Winamax et Le Club des 5. « Quand Lionel Messi a reçu le ballon d’Or, il y en a beaucoup qui ne comprenaient pas que l’on attribue ce prix sur la base de la Copa America. Une manière de dire que les compétitions européennes prévalent sur le reste. » Erreurs, approximations, et comparaisons hasardeuses semblent ainsi être le fruit d’une méconnaissance du football local et de la pluralité de son offre. Très peu suivent religieusement les championnats nationaux africains comme on se passionne pour la Premier League, la Série A ou la Liga. 
Le foot africain a longtemps été perçu comme un sous-football. Concernant la CAN, compétition la plus importante du continent, le calendrier faisait que les médias avaient tendance à se focaliser sur l’agenda européen, plutôt que de prioriser des matchs à 0-0 avec des pelouses pourries, pour caricaturer.

Mansour Loum, rédacteur en chef de SportNewsAfrica

 
Dans l’Hexagone, une nouvelle génération afro-descendante consomme le football différemment, avec un intérêt grandissant pour les sélections nationales et un sentiment d’appartenance plus fort. Exemple le plus prégnant, la « CAN des quartiers », phénomène ayant pris son essor à Créteil en 2019, s’est massivement répandu dans plusieurs villes franciliennes. Montreuil, Goussainville, Evry, Aulnay-sous-Bois, Paris 18ᵉ… Toutes se sont approprié le tournoi, devenu un symbole d’une africanité exaltée. « C’est cette nouvelle appétence pour la CAN qui explique le regain d’intérêt médiatique pour la compétition, ajoute Mansour Loum. De plus, les stars qui y participent attirent l’œil, des joueurs comme Sadio Mané, Mohamed Salah, Riyad Mahrez ou encore Édouard Mendy brillent à l’international pour leurs qualités sportives. » Plus de compétitivité, donc plus d’attractivité, mais qui pour en parler ?
« L’erreur est humaine, sauf en Afrique, où elle appartient à tous les Africains », posait l’écrivain franco-algérien Mabrouck Rachedi en janvier dernier dans une chronique signée pour Le Monde. Le postulat pointe un amalgame trop souvent observé dans l’indifférence. Une sorte de vérité muette que l’on approuve sans dénoncer. L’Europe et son foot traînent pourtant bien leur lot d’effets indésirables, sur les pelouses ou hors des rectangles verts. En décembre dernier, l’imbroglio des tirages pour les huitièmes de finale de la Ligue des champions entache l’image de la plus haute institution du football européen. Mais quelques heures seulement suffisent à gommer l’erreur des boules. Un « problème technique », selon les mots de l’UEFA, éclipsé par l’annonce d’un choc entre le Real Madrid et le Paris Saint-Germain. « Les gaffes commises dans ces contrées relèvent d’individus. Ce sont des actes isolés, poursuit Mabrouck Rachedi. Ils ne sont pas révélateurs d’une mentalité, d’une culture. Ils peuvent certes être moqués, mais ils ne sont pas ramassés en un tout réducteur. » Jamais rattachés à un continent.
La condescendance notable envers les compétitions africaines s’inscrit dans un contexte d’ethnocentrisme, et n’est en rien propre à l’Afrique. « Cette déconsidération ne s’observe pas que pour la CAN, soutient Elton Mokolo, journaliste à Winamax et Le Club des 5. Quand Lionel Messi a reçu le ballon d’Or, il y en a beaucoup qui ne comprenaient pas que l’on attribue ce prix sur la base de la Copa America. Une manière de dire que les compétitions européennes prévalent sur le reste. » Erreurs, approximations, et comparaisons hasardeuses semblent ainsi être le fruit d’une méconnaissance du football local et de la pluralité de son offre. Très peu suivent religieusement les championnats nationaux africains comme on se passionne pour la Premier League, la Série A ou la Liga. 
Le foot africain a longtemps été perçu comme un sous-football. Concernant la CAN, compétition la plus importante du continent, le calendrier faisait que les médias avaient tendance à se focaliser sur l’agenda européen, plutôt que de prioriser des matchs à 0-0 avec des pelouses pourries, pour caricaturer.

Mansour Loum, rédacteur en chef de SportNewsAfrica

Dans l’Hexagone, une nouvelle génération afro-descendante consomme le football différemment, avec un intérêt grandissant pour les sélections nationales et un sentiment d’appartenance plus fort. Exemple le plus prégnant, la « CAN des quartiers », phénomène ayant pris son essor à Créteil en 2019, s’est massivement répandu dans plusieurs villes franciliennes. Montreuil, Goussainville, Évry, Aulnay-sous-Bois, Paris 18ᵉ… Toutes se sont approprié le tournoi, devenu un symbole d’une africanité exaltée. « C’est cette nouvelle appétence pour la CAN qui explique le regain d’intérêt médiatique pour la compétition, ajoute Mansour Loum. De plus, les stars qui y participent attirent l’œil, des joueurs comme Sadio Mané, Mohamed Salah, Riyad Mahrez ou encore Édouard Mendy brillent à l’international pour leurs qualités sportives. » Plus de compétitivité, donc plus d’attractivité, mais qui pour en parler ?

Culture de l’insolite

Culture de l’insolite

La 12 janvier dernier, Jérôme Rothen, ancien milieu de terrain reconverti en consultant, s’enflamme dans son podcast éponyme proposé par RMC. Entouré de sa « Dream Team », il vitupère, énumère tour à tour les maux qui lèsent la CAN, les pelouses arides, les stades qui sonnent creux. « Ce qu’il s’est passé aujourd’hui est inadmissible. Ça donne raison à tous les détracteurs de la Coupe d’Afrique. Pourtant, j’étais le premier à protéger la compétition », fustige l’ex-footballeur en réaction au match Tunisie-Mali. Au bout de son laïus, la conclusion acerbe donne le ton : « Pour l’instant, [la CAN] est une parodie de football ». Quatre jours après le début du tournoi, on le maculait déjà de clichés. 

🗣💬 @RothenJerome : “Ce qui s’est passé aujourd’hui est totalement ubuesque ! (…) Pour l’instant cette CAN, c’est une parodie de football !” #rmclive pic.twitter.com/kQYQyRtTef

— Rothen s’enflamme (@Rothensenflamme) January 12, 2022

« Dès que ça touche au continent africain, tout est exacerbé, observe Mansour Loum. Pourtant, il y a des erreurs d’arbitrages sur les pelouses européennes tous les week-ends. Mais en Afrique, automatiquement, une erreur d’arbitrage est associée à de la corruption. » En outre, le traitement médiatique de la CAN, davantage tourné vers l’actualité insolite que les performances sportives, « pour que les communautés africaines, qui sont les principales cibles commentent ; parce que l’insolite fait vendre », conclut le journaliste. Qu’allons-nous retenir de cette 33ᵉ édition ? Le parcours héroïque des Comores pour leur première participation ? Celui de la Gambie qui s’est hissée en quart de finale ? La performance technique des Ivoiriens, tombeurs de l’Algérie tenante du titre ? Ou encore les six buts marqués en six matchs par Vincent Aboubakar ? Sur Twitter, exception faite des résumés de match, les posts liés à la CAN mis en avant sur le compte de L’Equipe, média leader de la presse sportive en France, relaient majoritairement les faits sensationnalistes survenus lors de la compétition.
« Le Gabon débute sa CAN dans un climat nauséabond », partageait le compte au premier jour de la compétition. « Des fusillades ont eu lieu à Buea mercredi, dans l’ouest du Cameroun, qui accueille plusieurs équipes en lice pour la CAN. », tweetaient-ils le 13 janvier. Ou encore, « Covid, polémiques avec la CAF, élimination : le récit de la folle journée des Comores à la CAN », daté du 25 janvier. Pour sa une, le journal ne laisse que très peu d’espace au football africain, gratifié d’une double page dans l’édition papier. Les exploits individuels d’Aboubakar, meilleur buteur de la compétition avec huit réalisations, auraient pourtant mérité plus. « Il faut remonter à 1998 pour voir au moins six buts d’un seul joueur à la CAN », rappelle Elton Mokolo. Pour autant, le journaliste tempère et met en garde contre les généralités imprudentes : « Il est quand même important de valoriser le fait que certaines émissions, comme le Club des 5 que je présente ou encore beIN Sport, qui couvre toute la compétition, parlent quotidiennement de la CAN et en ont une lecture approfondie. » Dans un entretien croisé, So Foot a donné la parole à Chaker Alhadhur, Fouad Bachirou, Salim Ben Boina, Badr El Hariri et Youssouf M’Changama, tous les cinq joueurs de la sélection comorienne, afin qu’ils retracent les étapes de leur succès. Une autre clé de lecture pour saisir les enjeux réels de l’évènement. 
La 12 janvier dernier, Jérôme Rothen, ancien milieu de terrain reconverti en consultant, s’enflamme dans son podcast éponyme proposé par RMC. Entouré de sa « Dream Team », il vitupère, énumère tour à tour les maux qui lèsent la CAN, les pelouses arides, les stades qui sonnent creux. « Ce qu’il s’est passé aujourd’hui est inadmissible. Ça donne raison à tous les détracteurs de la Coupe d’Afrique. Pourtant, j’étais le premier à protéger la compétition », fustige l’ex-footballeur en réaction au match Tunisie-Mali. Au bout de son laïus, la conclusion acerbe donne le ton : « Pour l’instant, [la CAN] est une parodie de football ». Quatre jours après le début du tournoi, on le maculait déjà de clichés. 

🗣💬 @RothenJerome : “Ce qui s’est passé aujourd’hui est totalement ubuesque ! (…) Pour l’instant cette CAN, c’est une parodie de football !” #rmclive pic.twitter.com/kQYQyRtTef

— Rothen s’enflamme (@Rothensenflamme) January 12, 2022

« Dès que ça touche au continent africain, tout est exacerbé, observe Mansour Loum. Pourtant, il y a des erreurs d’arbitrages sur les pelouses européennes tous les week-ends. Mais en Afrique, automatiquement, une erreur d’arbitrage est associée à de la corruption. » En outre, le traitement médiatique de la CAN, davantage tourné vers l’actualité insolite que les performances sportives, « pour que les communautés africaines, qui sont les principales cibles commentent ; parce que l’insolite fait vendre », conclut le journaliste. Qu’allons-nous retenir de cette 33ème édition ? Le parcours héroïque des Comores pour leur première participation ? Celui de la Gambie qui s’est hissée en quart de finale ? La performance technique des Ivoiriens, tombeurs de l’Algérie tenante du titre ? Ou encore les six buts marqués en six matchs par Vincent Aboubakar ? Sur Twitter, exception faite des résumés de match, les posts liés à la CAN mis en avant sur le compte de L’Equipe, média leader de la presse sportive en France, relaient majoritairement les faits sensationnalistes survenus lors de la compétition.
« Le Gabon débute sa CAN dans un climat nauséabond », partageait le compte au premier jour de la compétition. « Des fusillades ont eu lieu à Buea mercredi, dans l’ouest du Cameroun, qui accueille plusieurs équipes en lice pour la CAN. », tweetaient-ils le 13 janvier. Ou encore, « Covid, polémiques avec la CAF, élimination : le récit de la folle journée des Comores à la CAN », daté du 25 janvier. Pour sa une, le journal ne laisse que très peu d’espace au football africain, gratifié d’une double page dans l’édition papier. Les exploits individuels d’Aboubakar, meilleur buteur de la compétition avec huit réalisations, auraient pourtant mérité plus. « Il faut remonter à 1998 pour voir au moins six buts d’un seul joueur à la CAN », rappelle Elton Mokolo. Pour autant, le journaliste tempère et met en garde contre les généralités imprudentes : « Il est quand même important de valoriser le fait que certaines émissions, comme le Club des 5 que je présente ou encore beIN Sport, qui couvre toute la compétition, parlent quotidiennement de la CAN et en ont une lecture approfondie. » Dans un entretien croisé, So Foot a donné la parole à Chaker Alhadhur, Fouad Bachirou, Salim Ben Boina, Badr El Hariri et Youssouf M’Changama, tous les cinq joueurs de la sélection comorienne, afin qu’ils retracent les étapes de leur succès. Une autre clé de lecture pour saisir les enjeux réels de l’évènement. 
Photo : Tim Walker
Comme l’auteure, Emma Watson prêche un féminisme décloisonné et veut briser les stéréotypes de genre. “Je me souviens avoir regardé le discours d’Hillary Clinton en 1997 sur les droits des femmes, disant qu’il s’agissait de droits humains. Quand ils ont montré le public, et il y avait presque exclusivement des femmes. Pourquoi pensons-nous que cette conversation n’est pas une chose que tous les êtres humains ont besoin d’entendre ?” s’interroge-t-elle. Durant six mois, elle charpente le discours que l’organisation lui commande “à partir des ébauches du journal [qu’elle tenait] depuis l’âge de 12 ou 13 ans.” Nommée ambassadrice de bonne volonté par ONU Femmes deux mois avant son allocution, l’oratrice veut marquer les esprits et son époque.
 
D’autres actrices avant elles ont mis leur notoriété au service de la cause : Jane Fonda, Nicole Kidman, Ellen Page ou encore Natalie Portman. Aujourd’hui, pour espérer convaincre, les combats pour l’égalité sont de moins en moins formulés et portés par des personnalités politiques, aux arguments usés par le temps. Il faut des modèles générationnels, des figures. Emma Watson en est une. Le jour de son 25ᵉ anniversaire, le magazine Time la propulse dans une autre sphère. Son nom figure dans la liste des 100 personnalités les plus influentes de l’année, catégorie “pionniers”. Un rôle gratifiant, mais souvent trop lourd à assumer, qui traîne parfois son lot d’effets indésirables.

Un manque de représentativité

 

Un manque de

représen-

tativité

Le journalisme sportif est un microcosme, avec ses chaînes onéreuses, ses émissions stars et ses animateurs vedettes, difficiles à déloger. La CAN, comme toutes les autres compétitions, nécessite pourtant un haut niveau d’expertise pour en assurer une juste couverture. Romain Molina, journaliste d’investigation et auteur de plusieurs ouvrages sur le sport, regrette que le traitement médiatique de la Coupe d’Afrique se cantonne trop souvent aux footballeurs évoluant en Europe et aux grandes sélections (Cameroun, Sénégal, Algérie, Côte d’Ivoire, Maroc etc…). 
Si l’on ne donne pas la parole aux vrais experts, il y aura forcément un mauvais traitement médiatique. Des véritables spécialistes en France, on en trouve plein, comme Lofti Wada ou encore Abdellah Boulma, mais ils ne sont pas mis en avant. On va préférer prendre des consultants ayant officié sur le continent, mais dont la vision reste approximative.

Romain Molina

Des personnalités qui se sont vues attribuer le statut d’expert en football africain, « comme Claude Le Roy ou Gernot Rohr, et que l’on revoit tout le temps », ajoute Molina.
Ce système en vase-clos, bâti sur des « réseaux de copinage » conduit inéluctablement à une « stérilisation générale du débat », dénonce Mansour Loum. « C’est toujours les mêmes personnes, qui abordent les mêmes thématiques, émettent les mêmes commentaires et finalement, toutes les émissions ont tendance à se ressembler. » Les fils d’actualité Twitter, arrosés de contenus similaires, souvent sensationnalistes ou insolites, témoignent de cette polarisation de l’information. Et si le niveau faible d’expertise fait défaut à la couverture médiatique du football africain, le manque de représentativité est un frein à la richesse des sujets traités et des approches journalistiques. Le phénomène s’observe surtout au sein des médias généralistes où la diversité — raciale, sociale ou de genre — est encore largement défaillante. « Le fait d’avoir un système uniformisé conduit à un manque d’ouverture sur certains points, sur certains aspects. C’est un problème que dénoncent énormément de journalistes. Après, il y a ceux qui en profitent, et ceux qui constatent juste ce qu’il se passe », précise Mansour Loum. 
 
Les statistiques ethniques étant prohibées en France, il est difficile d’évaluer la part des journalistes issus des minorités visibles dans l’écosystème médiatique. Pour autant, l’absence de données chiffrées n’empêche pas le constat d’exister, comme le juge Romain Molina : « Regardez le nombre de consultants aujourd’hui issus de l’Afrique subsaharienne, il y en a combien ? On ne laisse pas assez la parole aux journalistes compétents, au profit d’un entre-soi structurel. »
Le journalisme sportif est un microcosme, avec ses chaînes onéreuses, ses émissions stars et ses animateurs vedettes, difficiles à déloger. La CAN, comme toutes les autres compétitions, nécessite pourtant un haut niveau d’expertise pour en assurer une juste couverture. Romain Molina, journaliste d’investigation et auteur de plusieurs ouvrages sur le sport, regrette que le traitement médiatique de la Coupe d’Afrique se cantonne trop souvent aux footballeurs évoluant en Europe et aux grandes sélections (Cameroun, Sénégal, Algérie, Côte d’Ivoire, Maroc…). 
Si l’on ne donne pas la parole aux vrais experts, il y aura forcément un mauvais traitement médiatique. Des véritables spécialistes en France, on en trouve plein, comme Lofti Wada ou encore Abdellah Boulma, mais ils ne sont pas mis en avant. On va préférer prendre des consultants ayant officié sur le continent, mais dont la vision reste approximative.

Romain Molina

Des personnalités qui se sont vues attribuer le statut d’expert en football africain, « comme Claude Le Roy ou Gernot Rohr, et que l’on revoit tout le temps », ajoute Molina.
Ce système en vase-clos, bâti sur des « réseaux de copinage » conduit inéluctablement à une « stérilisation générale du débat », dénonce Mansour Loum. « C’est toujours les mêmes personnes, qui abordent les mêmes thématiques, émettent les mêmes commentaires et finalement, toutes les émissions ont tendance à se ressembler. » Les fils d’actualité Twitter, arrosés de contenus similaires, souvent sensationnalistes ou insolites, témoignent de cette polarisation de l’information. Et si le niveau faible d’expertise fait défaut à la couverture médiatique du football africain, le manque de représentativité est un frein à la richesse des sujets traités et des approches journalistiques. Le phénomène s’observe surtout au sein des médias généralistes où la diversité — raciale, sociale ou de genre — est encore largement défaillante. « Le fait d’avoir un système uniformisé conduit à un manque d’ouverture sur certains points, sur certains aspects. C’est un problème que dénoncent énormément de journalistes. Après, il y a ceux qui en profitent, et ceux qui constatent juste ce qu’il se passe », précise Mansour Loum. 
Les statistiques ethniques étant prohibées en France, il est difficile d’évaluer la part des journalistes issus des minorités visibles dans l’écosystème médiatique. Pour autant, l’absence de données chiffrées n’empêche pas le constat d’exister, comme le juge Romain Molina : « Regardez le nombre de consultants aujourd’hui issus de l’Afrique subsaharienne, il y en a combien ? On ne laisse pas assez la parole aux journalistes compétents, au profit d’un entre-soi structurel. »
Maëlys Kapita