“Quand on faisait des soirées avec mes amis, on installait des appareils photos jetables dans toute la maison et on disait aux gens de les utiliser toute la nuit. Le lendemain matin, on faisait développer les clichés et on se s’interrogeait sur ce qu’il s’était passé la veille.” C’est par ces mots que Dave Dobrik résume la genèse de Dispo. Lancée le 19 février dernier sur l’Apple Store, cette application photo est l’une des attractions digitales de ce début d’année. Son concept est extrêmement simple.
Dispo reprend le fonctionnement d’un appareil photo jetable, en proposant aux utilisateurs de prendre un cliché et de le découvrir dans un second temps. Il faut en effet patienter jusqu’au lendemain de la capture, où l’on peut découvrir sa photo à partir de 9 heures du matin. Le cliché, retouché automatiquement par un filtre imitant le charme et les défauts des appareils jetables, n’est ensuite absolument pas modifiable.
Les développeur de Dispo prennent ainsi le pari de délaisser l’instantanéité de la photo digitale au smartphone, pour renouer avec les sensations (perdues) de la photographie analogique. L’application impose d’une part l’attente pour visionner ses souvenirs, tout en nous privant de la multitude d’options de retouches offertes par le choix d’effets et de filtres. La nostalgie est donc l’élément moteur de Dispo, qui prend ici le contre-pied de l’univers ultra-codifié d’Instagram et de ses clichés n’ayant souvent plus grand chose de naturel. Tout le monde est ici mis sur un pied d’égalité, en étant équipé du même appareil faussement jetable. Contrairement à Instagram, Dispo autorise un droit à l’erreur.
Avec son interface épurée et ludique (un rectangle de cadrage, un zoom et un bouton flash), Dispo place donc la spontanéité au coeur de son propos. On décide de partager ses photos ou de les garder pour soi, sans jamais pouvoir les accompagner d’une légende ou d’une localisation. Concernant son rôle de rôle social, Dispo fait le minimum et casse là encore les codes. L’application propose simplement de partager sa photo sur un “Roll” (une série photo) individuelle ou collective, de suivre des profils, de liker et de commenter d’autres photos.
Jusqu’ici uniquement accessible sur invitation, à l’instar de Clubhouse, l’autre sensation de ce début d’année, Dispo n’en demeure pas moins très populaire. Moins d’une semaine après sa sortie, l’application se classait ainsi à la 4ème place des téléchargements sur l’AppStore US. La création de Dave Dobrik, par railleurs star de Vine en son temps puis de YouTube, est également scrutée de très près par les investisseurs.
Après une première levée de fonds de 4 millions de dollars en octobre dernier, elle vient d’en boucler une seconde en amassant 20 millions de dollars auprès de plusieurs fonds d’investissement. Le très sérieux Axios précise d’ailleurs que la valorisation de Dispo est actuellement de 200 millions de dollars. Et selon plusieurs médias américains, l’application devrait encore lever des fonds au cours des mois et semaines à venir.
Encore relativement confidentiel en France, Dispo ne devrait pas tarder à séduire les photographes en herbe et les lassés d’Instagram. L’emphase sur cette tendance nostalgique d’un “monde plus simple avant” lui permettra assurément de trouver son public. De là à devenir l’un des nouveaux mastodontes d’internet ? L’avenir nous le dira.
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